Participatif
ACCÈS PUBLIC
23 / 11 / 2011 | 2 vues
Benoît Coquille / Membre
Articles : 26
Inscrit(e) le 06 / 12 / 2010

La santé « rapporte » plus à l’économie plus que l’hôtellerie-restauration et le BTP.

Le 18 novembre 2011, l’Institut Montparnasse a présenté les travaux de recherche menés à son initiative. Deux conclusions émergent particulièrement qui battent en brèche certaines idées reçues sur la protection sociale solidaire et la santé :
  • la hausse des dépenses de santé n’est que très peu la conséquence du vieillissement de la population, et bien davantage des changements de pratiques médicales ;
  • la santé « rapporte » à l’économie : sa valeur ajoutée dans le PIB est supérieure à celle de l’hôtellerie-restauration et du BTP.

« Pour un XXIème siècle solidaire »

Créé en 2009 à l’initiative de la MGEN, l’Institut Montparnasse a pour ambition d’apporter un nouveau regard sur la Sécurité sociale, pour contribuer à en renforcer le caractère solidaire. Elle veut bousculer les idées reçues par des analyses et réflexions nouvelles sur quatre grandes thématiques :

  • « perspectives de l’Assurance-maladie »,
  • « financement et contribution de la Sécurité sociale à l’économie »,
  • « assurance et société »,
  • « solidarité et société ».

Les travaux de chaque thématique sont respectivement placés sous la responsabilité de Didier Tabuteau (directeur de la chaire santé de Sciences-Po), Jean-Hervé Lorenzi (directeur de la chaire transitions démographiques, transitions économiques de l’Université Paris-Dauphine, président du Cercle des économistes), François Ewald (Professeur au CNAM, directeur de l’École nationale d’assurance), Michel Wieviorka (directeur d’étude à l’EHESS, directeur de la Fondation Maison des sciences de l’homme).

L’institut a initié une première série d’études dont les orientations et certaines conclusions ont été présentées lors de son colloque du 18 novembre 2011. Ces études seront achevées et publiées à la fin de l’année.

Vieillissement de la population : un facteur minime d’augmentation des dépenses de santé

L’étude sur les déterminants des dépenses de santé dirigée par Brigitte Dormont (chaire santé de Paris-Dauphine) contredit l’idée répandue selon laquelle les dépenses de santé augmentent du fait du vieillissement de la population.

Cette idée repose sur deux constats :
  • la proportion des plus de 65 ans dans la population augmente fortement (autour de 17 % actuellement et 27 % en 2050),
  • les dépenses de santé moyennes des personnes âgées sont supérieures à celles des autres tranches d’âges (en 2000 : 1 100€ par an à 30 ans, 3 600€ à 70 ans).

Pourtant, l’essentiel de l’augmentation des dépenses provient de la dynamique du progrès médical.

Entre 2000 et 2008, les dépenses ont ainsi cru de 20,5 % dont 3,8 % liés au vieillissement et 12,4 % aux changements de pratiques. Dans la hausse très importante des dépenses de médicaments (+57,6 %), le vieillissement compte pour 4,8 % et les changements de pratiques pour 36 %.

Un double processus est à l’œuvre : la médecine innove avec de nouveaux traitements (pratiques médicales, médicaments) et ces innovations sont diffusées largement. Par exemple, l’angioplastie est plus performante et moins onéreuse que le pontage. De ce fait, cette pratique a été récemment généralisée, ce qui induit au final, une dépense plus forte à l’échelle nationale.

L’enquête apporte ainsi la preuve que la hausse des dépenses n’est pas un phénomène naturel, non-maîtrisable, mais le résultat d’une évolution collectivement souhaitée. Maîtriser les dépenses implique alors de s’assurer que les nouvelles pratiques apportent de réels progrès pour les patients.

Dépenses de santé : un investissement bénéfique à la croissance économique

 

Une équipe de l’EN3S (étude Fargeon, Brunat, Euzéby) confirme que la hausse des dépenses contribue positivement au développement économique.

Dans le PIB (en 2005), la valeur ajoutée de la santé est de 9,3 %, soit plus que le BTP (5,8 %) et l’hôtellerie-restauration (2,3 %) réunis.

L’assurance-santé contribue également fortement au niveau de vie des ménages, et donc à la consommation. En 2003, la santé représentait 41,3 % des transferts sociaux en nature, soit 3 843 € (revenus primaires moyens : 45 015 €).

Ces transferts permettent, par ailleurs, de réduire les inégalités sociales : les 20 % des ménages ayant les revenus primaires les plus faibles percevant davantage (3 945 €) que les 20 % ayant les revenus les plus élevés (3 550 €).

L’étude prouve ainsi que l’investissement dans la santé profite à l’économie dans son ensemble. Il s’agit d’une conclusion très importante alors que la santé publique, à travers l’Assurance-maladie et l’hôpital, est de plus en plus présentée comme un coût et que la légitimité des dépenses sociales comme levier de performance économique est mise en cause.

Financement d’une protection sociale durable, prédiction en assurance-santé : de nouvelles études en préparation

Plusieurs scénarios de financement de la Sécurité sociale seront prochainement proposés par une étude spécifique (Université Dauphine, direction Jean-Hervé Lorenzi). Avec l’augmentation à venir de la proportion de retraités par rapport aux actifs, le creusement des déficits est en effet inéluctable si le financement actuel, qui repose uniquement le travail, n’est pas modifié en profondeur. L’étude ébauche plusieurs scénarios et étudie l’impact d’éventuels nouveaux prélèvements obligatoires (CSG, TVA sociale, taxation des échanges financiers…) sur l’économie. Cette modélisation sera une aide à la décision publique.

François Ewald a initié une seconde étude sur l’impact de l’émergence du « big data ». Les technologies numériques permettant la collecte de données en quantités exponentielles, leur exploitation ouvre des perspectives en matière de prédiction d’événements. En santé, cela pourrait influencer la prévention et l’assurance. Face aux nombreuses réticences que la gestion de données personnelles suscite légitimement, cette étude analyse les risques et les opportunités.
Pas encore de commentaires