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10 / 11 / 2020 | 152 vues
Jacky Lesueur / Abonné
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Réforme du CESE : où en est-on ?

La mandature en cours qui arrivait à son terme cet automne a été prolongée jusqu’au 1er juin 2021 au plus tard (loi organique du 10 août 2020) compte tenu du processus de réforme engagé par le Gouvernement .
 

La loi organique qui encadrera le nouveau Conseil est en débat au Parlement. L’Assemblée Nationale l’a votée en 1ère lecture le 17 septembre et a suivi son cheminement au Sénat  qui a intégré un certain nombre d'amendements mi-octobre  (1)


Lydia Brovelli et Claude Mennecier viennent de faire le point sur les réformes en cours pour la revue Bloc Notes de l'Amicale du CESE. Ils ont bien voulu nous autoriser à reprendre l'essentiel de leur analyse et de leurs observations en l'état actuel du dossier.

 

Des missions accrues
 

Le CESE aura désormais une triple vocation : il aura pour rôle d’éclairer les pouvoirs publics sur les enjeux économiques, sociaux et environnementaux, en particulier sur les conséquences à long terme de leurs décisions. Il devra aussi traiter des pétitions et deviendra le carrefour des consultations publiques.
 

Une méthode de travail renouvelée
 

Le fil conducteur de la réforme se situe dans « une participation citoyenne renforcée ». « Forum de la société civile », le CESE pourra organiser la consultation du public en associant des citoyens à ses travaux.
 

Concrètement il pourra à son initiative organiser une procédure de tirage au sort afin d’associer le public aux travaux des « commissions » (nouvelle appellation des sections dont nous avons été membres) et le Parlement aura la faculté de demander au Conseil de procéder à une telle consultation, afin de « renforcer le lien entre démocratie représentative et démocratie participative ».
 

Les conditions du tirage au sort sont encadrées : des garanties de sincérité, d’égalité, de transparence et d’impartialité sont inscrites dans le texte voté par l’Assemblée nationale, de même qu’une représentativité appropriée à l’objet de la consultation et une représentation équilibrée du territoire. Il s’agit donc d’un tirage au sort très différent de celui des jurés d’assises.
 

La procédure simplifiée, qui existait déjà, est renforcée. Elle permettra à une « commission » de rendre l’avis du CESE dans un délai de 2 semaines, sauf si 1/3 des membres du CESE exigent un examen de l’avis en séance plénière de l’assemblée (Jusqu’à présent il suffisait d’une dizaine de demandeurs, de sorte que, pratiquement, tous les avis étaient votés en plénière).
 

Une composition réduite et modifiable
 

Désormais composé de 175 membres (2) , répartis en 4 catégories, la plupart des groupes subiront une réduction d’un quart du nombre de conseillers : les représentants des salariés seront 52 contre 69 actuellement. Même chose pour les représentants des entreprises, exploitants agricoles, artisans, professions libérales, mutuelles, coopératives et chambres consulaires : 52 contre 69. Les conseillers désignés au titre de la cohésion sociale, territoriale et de la vie associative passeront de 60 à 45. Seuls les représentants de la protection de la nature et de l’environnement verront leur effectif augmenter : 26 contre 18.
 

Cette composition, enfin, sera évolutive : 6 mois avant la fin de chaque mandature un comité (3)  sera chargé de proposer des évolutions.
 

Des interrogations
 

La réduction du nombre de conseillers s’appuie, selon le propos du Premier ministre, sur l’engagement du Président de la République. Mais -si notre mémoire ne nous fait pas défaut- cela ne concernait pas que le CESE ? Or aujourd’hui il est la seule assemblée constitutionnelle à se voir appliquer « l’engagement ».
 

Concernant les pétitions : l’abaissement du seuil (150 000 signatures par voie électronique seront suffisantes pour qu’il ait obligation d’en traiter) et de l’âge des pétitionnaires (16 ans), la suppression de l’obligation que les signataires viennent de 30 départements différents, ne risquent-t-ils pas de noyer le Conseil, lui laissant moins de temps pour les saisines ? Il ne faudrait pas qu’une systématisation du recours à la procédure simplifiée pour traiter de celles-ci aboutisse à amoindrir la qualité du travail avec l’adoption d’avis en 15 jours en commission, économisant un débat et une adoption en séance plénière. La crédibilité de l’institution, déjà injustement contestée, pourrait s’en ressentir.

 

Par ailleurs la suppression de la consultation d’un certain nombre d’instances qui était opérée pour des projets de loi portant sur des questions économiques, sociales, environnementales, (sauf pour les concertations prévues dans le code du travail et celles explicitement mentionnées dans la nouvelle loi organique) au profit du seul avis du CESE est-elle opportune ? Simplifier est une bonne chose mais au prix d’une réduction du dialogue social avec la société civile organisée, est-ce efficace ? Cela s’ajoute à une sorte de rééquilibrage avec la société civile « non organisée » via le tirage au sort, comme si la représentativité des corps intermédiaires contrevenait à la démocratie.

 

Enfin que soit prévu un examen du fonctionnement d’une institution en fin de mandature n’a rien de choquant, au contraire, mais en quoi cela doit-il aboutir à réviser la composition de l’institution ?

 

Prévoir de vérifier l’adéquation des moyens alloués aux missions conférées ne serait-il pas plus efficient ?

 

Adéquation dont il faudrait s’assurer aujourd’hui et maintenant, avant le vote de la loi organique.

 

Or pour l’instant ce n’est manifestement pas un sujet qui est abordé.
 


(1) Les amendements du sénat (séances des 14 et 15 octobre)

Il s’est opposé à toute légitimation du tirage au sort : nos institutions étant construites sur la légitimité de l’élection, la participation citoyenne peut nourrir la délibération démocratique et non s’y substituer, d’autant que le tirage au sort prévu s’apparente à un sondage d‘opinion . Considérant par ailleurs que le projet aboutirait à un affaiblissement du CESE et qu’il codifie des mesures déjà utilisées il a notamment :

-              Supprimé l’article 4 qui prévoit le tirage au sort ;

-              Supprimé l’article 6 qui fait du CESE le guichet unique pour les consultations préalables aux projets de lois ;

-              En cas de recours à la procédure simplifiée le Bureau du CESE doit se prononcer sur l’avis ;

-              L’effectif des conseillers est porté à 193, le gouvernement doit rendre public les critères de répartition des sièges et préserver la présence de la société civile des outre-mer.
 

Le projet de loi étant examiné en procédure accélérée le texte va maintenant passer en commission mixte paritaire. A suivre…

 

(2) Un décret précisera la répartition et les conditions de nomination

(3) Composé de 3 députés, 3 sénateurs , 3 membres du CESE, un représentant du Conseil d'Etat et un magistrat de la Cour des Comptes

 

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