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03 / 05 / 2024 | 99 vues
Jacky Lesueur / Abonné
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Équilibre vie professionnelle-vie personnelle : le CESE appelle à une protection juridique du temps libre

Saisi par le Gouvernement, le CESE a adopté ( à l'unanimité moins quelques abstentions) en séance plénière le 23 avril  son avis "Articulation des temps de vie professionnel et personnel : de nouveaux défis", rapporté par Christelle Caillet (Groupe de la CFDT) et Elisabeth Tomé-Gertheinrichs (Groupe Entreprises) au nom de la Commission Travail et Emploi présidée par Sophie Thiéry (Groupe de la CFDT).

 

Aujourd'hui, 64% des personnes en France ne travaillent pas sur des semaines standards à horaires fixes et diurnes sur cinq jours ouvrés. Face aux évolutions du rapport au travail et des conditions de vie, la recherche de l'équilibre des temps de professionnel et personnel est au coeur des nouvelles attentes des salariés.

 

Afin de comprendre le ressenti et les envie des citoyennes et citoyens sur le sujet, la Commission Travail et Emploi a lancé de décembre 2023 à janvier 2024 une consultation citoyenne ayant recueilli près de 11 000 contributions. En parallèle, pour compléter cet état des lieux, 37 auditions et 19 entretiens ont été menés avec des personnalités expertes de la problématique.

 

A la lumière de ces mois de travail, la Commission Travail et Emploi constate que trois séries de facteurs recomposent aujourd'hui l'équilibre vie professionnelle - vie personnelle :

 

  • les évolutions qui traversent le travail : transition écologique, télétravail, nouvelles technologies, adaptation au vieillissement de la population...
  • les évolutions des conditions de vie : accès difficile à un logement proche du travail, temps de transport important... qui pèsent sur le temps de repos et affectent le temps de travail
  • certaines situations de vie : familles monoparentales, proches aidants, personnes en situation de handicap, pour qui l'articulation des temps de vie peut être encore plus compliquée.

 

Sans être représentative de la population française, cette enquête permet de comprendre la mosaïquede situations qui composent le monde du travail en France, surtout à la lumière d’une analyse des données et mises en perspectives du CREDOC.


Ainsi :

 

  • 75% des répondants estiment notamment que le rythme de travail standard (5 jours ouvrés, 2 jours de weekend) n’est pas le rythme le plus adapté à un bon équilibre vie professionnelle – vie personnelle.
  • 51% des répondants souhaiteraient pouvoir décider le plus possible des moments où ils se connectent et se déconnectent, reposant ainsi le sujet du droit à la déconnexion.
  • 75% des répondants ont l’impression que leurs journées de travail sont de plus en plus intenses. Ce point est particulièrement souligné par les femmes (77%), dans le secteur de la santé et de l’action sociale (80%), dans les foyers monoparentaux (80%) ou encore chez les aidants (78%)

 

A partir de ces constats et analyses, le CESE  a voulu s’attacher à proposer des solutions qui permettent de répondre aux aspirations croissantes des actifs à un meilleur équilibre de vie, à un rapport plus individualisé au travail dans le respect du collectif, et à la quête de sens.

 


Une série de recommandations qui portent sur le secteur privé et sur le secteur public.


1. Poser au même niveau juridique le temps de travail et le temps libre, et en finir avec les zones grises entre temps libre et temps de travail


Le CESE propose que la notion de temps libre soit caractérisée juridiquement au cœur de la Charte européenne des droits sociaux, pour clarifier les notions de temps de travail d’une part et de temps libre d’autre part. Le temps libre s’entend comme un temps distinct du temps de travail et exempt de toute sujétion professionnelle.


Par ailleurs les « zones grises » qui existent aujourd’hui entre temps libre et temps de travail méritent également d’être clarifiées. A cet égard, les astreintes et le droit à la déconnexion sont deux marqueurs particulièrement intéressants. D’une part le régime des astreintes doit être revu pour être réservé à des situations exceptionnelles. D’autre part ; et c’est inattendu, le droit à la déconnexion n’est pas perçu de la même façon par tous les salariés. Pour 50 % des répondants le droit à la déconnexion, ce n’est plus enfermer le temps de connexion dans les bornes « classiques » du temps de travail, mais avoir la possibilité de se connecter et de se déconnecter quand ils le souhaitent.


2. Entendre une demande croissante de liberté et d’autonomie des actifs : engager un dialogue social interprofessionnel et professionnel, préciser son contenu lors des négociations dans l’entreprise et amorcer la révolution managériale.


Le CESE recommande l’ouverture d’une négociation interprofessionnelle sur l’articulation des temps pour accompagner les branches et les entreprises, notamment sur les points suivants :


- la prise en compte des besoins des salarié.e.s à différentes périodes de la vie et en fonction des différentes situations personnelles ;


- la mise en œuvre des moyens pour garantir l’effectivité du droit à la déconnexion, les aménagements possibles à la demande des salariés, et les règles de négociation collective sur le sujet ;


Au niveau de la branche, le CESE recommande l’ouverture dans chaque branche d’un « Conférence du progrès », qui permettra d’élaborer des diagnostics des spécificités de chaque secteur et d’organiser des pistes d’actions en faveur de l’articulation des temps. Parallèlement, des expérimentations accompagnées par l’Etat pourraient faire progresser le sujet.


Dans l’entreprise, la négociation sur l’articulation des temps doit être précisée dans son contenu pour créer les conditions d’un débat utile et équitable. Mais cela ne suffira pas : le temps est venu de faire du projet managérial un axe important des orientations stratégiques.


3. Considérer l’intensification du travail et l’urgence de ralentir


Le CESE recommande d’ouvrir la consultation sur les orientations stratégiques des entreprises qui devront prévoir leur déclinaison dans un projet de management en vue d’améliorer la qualité de vie et des conditions de travail, et les outils pour évaluer la charge de travail.


Le CESE préconise également de reposer, conformément à la jurisprudence, la question du droit à la
déconnexion, souvent citée dans les négociations sur la Qualité de Vie au Travail (QVT) mais rarement
traduite concrètement.


4. Accompagner le temps libre pour le libérer et le valoriser


Dans une logique d’égalité entre les femmes et les hommes, le CESE préconise de prévoir des mesures pour que les femmes et les hommes puissent prendre les congés liés à la parentalité de manière égale.


Par ailleurs la valorisation des compétences acquises dans le cadre de l’engagement associatif ou syndical est nécessaire : le CESE plaide pour une simplification de la valorisation des acquis de l’expérience pour ce type de parcours.

 

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