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Loi sur le travail : air de tango pour la santé au travail
La loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, dite « loi sur le travail », réforme une fois de plus la santé au travail.
Elle contient quelques dispositions qui constituent des avancées et d’autres qui sont manifestement des reculs et elle soulève beaucoup de questions.
Analysons cette leçon de tango argentin mal maîtrisée.
Harcèlement sexuel
- La loi durcit les règles et facilite l’accès des victimes aux recours : la victime peut seulement présenter des éléments de faits (au lieu d’établir des faits) laissant supposer (au lieu de présumer) un harcèlement sexuel.
- L’employeur doit désormais intégrer dans sa démarche de prévention la lutte contre les agissements sexistes et intégrer sa répression dans l’entreprise dans le règlement intérieur
Rôle du médecin du travail : article L4622-3 du code du travail
- La loi MEK réduit le champ des tiers introduits (par la loi Rebsamen) qui doivent être protégés par le médecin du travail. Du fait de sa communication, la CFE-CGC y est pour beaucoup dans ce retour à plus de raison
- Désormais, pour le médecin du travail, les tiers sont les gens qui ne sont pas des travailleurs évoluant dans l’environnement immédiat du travail et présentant un risque « manifeste » d’atteinte à leur santé et à leur sécurité par l’activité de travail.
- Pourtant, dans sa précipitation, le législateur ne maîtrisant pas le rythme de la musique, a oublié un pas en arrière ou en avant selon le regard porté. En effet seul l’article L.4622-3 qui concerne les missions du médecin du travail a été amendé dans le sens de la réduction du champ des « tiers » (constitué de tous les terriens). L’article L.4622-2 qui traite des missions des services de santé au travail a été « oublié ».
- Les médecins du travail sont évidemment soulagés de ne plus devoir porter le poids du monde. Mais les directeurs de services de santé au travail qui sont désormais les nouveaux Atlas, avec le soutien « herculéen » des membres non médecins de l’équipe pluridisciplinaire.
L’équipe pluridisciplinaire grandit.
Le collaborateur médecin du travail et l’interne en médecine du travail font désormais partie de l’équipe pluridisciplinaire.
La visite d’embauche est profondément modifiée (article L4624-1 du code du travail).
- La loi maintient malgré tout que chaque travailleur bénéficie d’un suivi individuel de son état de santé.
- Norme : chaque salarié bénéficie d’une visite d’information et de prévention après l’embauche. Cette visite est assurée par le médecin du travail ou par le collaborateur médecin, l’interne en santé au travail et l’infirmier en santé au travail. Ces derniers sont placés sous l'autorité du médecin du travail, donc sous sa responsabilité. Pas d’aptitude mais délivrance d’une attestation (de suivi).
- Attention ! « Le professionnel de santé qui réalise la visite d’information et de prévention peut orienter le travailleur, sans délai, vers le médecin du travail, dans le respect du protocole élaboré par ce dernier ». Ce qui, pour nous, implique la présence permanente et la disponibilité immédiate du médecin du travail « responsable ».
- Selon le nouvel article L4624-8, le dossier médical est toujours constitué par le médecin du travail alors que, lors de la visite d’embauche, les salariés sans risques particuliers peuvent ne pas être vus par lui.
Comment fait-on en pratique pour la visite d’embauche ? Le médecin du travail constitue-t-il le dossier sans voir le salarié ?
- La CFE-CGC a obtenu que cette visite d’information et de prévention soit réalisée par les professionnels de santé de l’équipe pluridisciplinaires et non par tous les membres de cette équipe, comme le projet le prévoyait initialement.
Exception : visite d’aptitude pour les travailleurs exposés à des risques particuliers
Article L4624-2 du code du travail : Tout travailleur affecté à un poste présentant des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité ou pour celles de ses collègues ou des tiers évoluant dans l'environnement immédiat de travail bénéficie d'un suivi individuel renforcé de son état de santé. Ce suivi comprend notamment un examen médical d'aptitude, qui se substitue à la visite d'information et de prévention prévue à l'article L. 4624-1.
Cette visite d’aptitude est effectuée par le médecin du travail, elle est effectuée avant l’embauche (comme les SMR actuellement) et est renouvelée périodiquement. Sauf « lorsque des dispositions spécifiques le confient à un autre médecin ». Un chauffeur routier, un pilote d’avion sont soumis à des visites d’aptitude spécifiques assurées par d’autres médecins (médecins dits « de préfecture », médecine de l’aviation civile).
Nous comprenons que dans ce cas le médecin du travail n’aura pas à faire de visite d’aptitude.
Quelle attitude doit avoir le médecin du travail qui constate, lors de la visite d’information ou de prévention, que le chauffeur de poids lourds présente une contre-indication médicale à la conduite (à l’heure actuelle, le secret médical n’est pas partagé entre ces médecins) ?
Comment peut-on envisager d’engager une procédure d’inaptitude à l’encontre d’un chauffeur de poids lourd alors que le médecin du travail n’a pas à donner d’aptitude au même chauffeur puisque cette aptitude appartient à cet « autre médecin ». En effet, les textes suivants traitant de l’inaptitude sont muets là-dessus ?
Article L.4624-1 du code du travail : Tout travailleur qui manifeste son statut de RTH ou d’invalide lors de sa visite d’information et de prévention est orienté « sans délai » vers le médecin travail pour bénéficier d’un suivi adapté. Visite d’aptitude ? On peut le supposer mais le texte est muet là-dessus.
Risques particuliers : qu’est-ce que c’est ?
Le texte : « risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité ou pour celle de ses collègues ou des tiers évoluant dans l'environnement immédiat de travail ».
- Les salariés malades ? Victimes d’AT/MP ? Handicapés ? invalides ? Ils sont a priori tous soumis à des risques pouvant nuire à leur santé ou à leur sécurité.
- Les salariés titulaires d’un poste de sécurité et présentant un état de santé susceptible de nuire à leur santé, leur sécurité ou celle des tiers évoluant dans l’environnement immédiat du travail devraient figurer sur la liste (dépistage de contre-indications médicales au poste de grutier, de conducteur d’engins, comme le fait l’arrêté du 18 décembre 2015 modifiant celui du 21 décembre 2005 fixant la liste des affections médicales incompatibles avec l’obtention ou le maintien du permis de conduire ou pouvant donner lieu à la délivrance de permis de conduire de durée de validité limitée.
La notion de postes à risques particuliers existe déjà dans le code du travail depuis 1990 : article L4154-2 CT (voir circulaire du 30 octobre 1990).
L’employeur doit dresser la liste des postes à risques particuliers, demander l’avis du CHSCT et/ou des DP et celui du médecin du travail. Les salariés intérimaires, les CDD et les stagiaires occupant de tels postes doivent bénéficier d’une formation renforcée à la sécurité. Faute de quoi, en cas d’AT/MP, la faute inexcusable est retenue « automatiquement » contre l’employeur. On parle de présomption irréfragable de faute inexcusable. Dans la circulaire, ce sont les travaux en hauteur, les risques SMR, les postes soumis à CACES…
Des décrets définiront les rôles de chacun des membres de l’équipe pluridisciplinaire et les modalités de définition de ces fameux postes à risques particuliers et les modalités du suivi renforcé.
L’article L. 4624-10 du code du travail : « Des décrets en Conseil d'État précisent les modalités d'action du personnel concourant aux services de santé au travail ainsi que les conditions d'application du présent chapitre, notamment les modalités du suivi individuel prévu à l'article L. 4624-1, les modalités d'identification des travailleurs mentionnés à l'article L. 4624-2 et les modalités du suivi individuel renforcé dont ils bénéficient ».
Suivi périodique
La loi sur le travail est peu loquace à ce propos. L’article L4624-1 du code du travail précise seulement que « les modalités et la périodicité du suivi prennent en compte les conditions de travail, l’état de santé et l’âge des travailleurs, ainsi que les risques professionnels auxquels il est exposé ».
Il est permis de supputer que les salariés « sans risque particulier ni personnel lié à l’état de santé, le handicap, l’état de grossesse, l’âge (les mineurs…) ni professionnel auront un suivi « allégé » dans la périodicité effectuée selon les mêmes modalités que la visite d’embauche.
Les décrets définiront cette périodicité et le médecin du travail aura peut-être la main concernant le suivi des travailleurs à risques « personnels ».
Salariés en CDD et intérimaires
Le principe
- Suivi individuel équivalent à celui des salariés en CDI
L’article L.4625-1-1 du code du travail prévoit un décret en Conseil d’État qui évoque la possibilité (qui avait notamment été proposée par la CFE-CGC) de créer un fichier commun semblable à celui des intérims pour les CDD courts, ce qui vise à diminuer la multiplication des visites d’embauche.
Ce décret en Conseil d’État prévoit les modalités d’information de l’employeur sur le suivi individuel de l’état de santé de son salarié et les modalités particulières d’hébergement des dossiers médicaux en santé au travail et d’échanges d’information entre médecins du travail.
Travail de nuit
- Disparition de la visite tous les 6 mois.
- La périodicité du suivi est déterminée par le médecin du travail.
- Un décret en CE déterminera les modalités du suivi.
Restrictions
- Ce point de la possibilité d’émettre des restrictions pour des motifs médicaux était non négociable pour la CFE-CGC.
- Le médecin du travail peut donc continuer d'émettre des restrictions pour adapter le poste de travail à l’état de santé du salarié.
- Le législateur a abandonné l’idée portée par le rapport Issindou/Fantoni de recueillir le consentement éclairé du salarié pour ce faire mais oblige d’émettre des restrictions d’échanger avec le salarié et l’employeur au préalable. Lors d’une visite médicale, si l'échange avec le salarié est très évidente et usuelle, il n’en va pas de même pour l’échange préalable avec l’employeur.
- Cette disposition soulève une difficulté majeure pour le salarié : que devient le salarié pendant le temps nécessaire à cet échange ? Remise au travail sans adaptation ? Quelles responsabilités du médecin du travail ? Inaptitude temporaire avec les aléas de prise en charge au titre d’indemnités journalières ?
- La contestation de l’avis ne relève plus de l’inspecteur du travail mais du conseil des prud’hommes, sous forme de référé expertise. Un expert judiciaire est désigné par le conseil des prud’hommes dans sa formation de référé.
La procédure d’inaptitude fait l’objet de profonds remaniements.
Une question de fond persiste : comment est-il possible de prononcer une inaptitude pour un poste sans aptitude ?
- Elle devient plus longue et plus complexe.
- Elle est peut-être plus protectrice pour le salarié du fait de la création d’étapes supplémentaires mais elle est régressive sous d’autres aspects.
Une question de fond persiste : comment est-il possible de prononcer une inaptitude pour un poste sans aptitude ? Une autre question déjà évoquée : certains postes sous soumis à l’aptitude d’autres médecins que le médecin du travail (aptitude à la conduite VL ou PL) : comment le médecin du travail peut-il engager une procédure d’inaptitude quand ce n’est pas lui qui se prononce sur l’aptitude ?
Inaptitude : à quel moment ?
- Désormais possible à tout moment et disparition du lien avec la suspension du contrat de travail et la reprise.
- L’inaptitude n’est pas au poste mais à l’emploi.
- Le médecin du travail donne un avis sur les capacités du salarié à occuper un autre emploi existant dans l’entreprise.
- L’employeur doit rechercher un autre emploi adapté aux capacités du salarié et doit solliciter l’avis des DP.
L’inaptitude n’est plus du tout liée à la notion de suspension du contrat de travail pour AT/MP ou maladie/accident non professionnel.
Article L. 1226-2 du code du travail : la procédure d’inaptitude peut être initiée au bénéfice d’un salarié victime d’une maladie ou un accident non professionnel sans relation temporelle avec le début de cette maladie ou la survenue de cet accident qui a pu avoir lieu 10 ou 20 ans auparavant, sans lien avec un arrêt de travail avec reprise.
Problème : l’article L.1226-4 du code du travail limite à un mois le délai dont dispose l’employeur pour reclasser ou licencier reste lié à la reprise.
« Lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail » (article L.1226-10 du code du travail).
La procédure d’inaptitude d’origine professionnelle n’est plus liée à la suspension du contrat de travail et donc à la reprise : l’AT ou la MP peuvent être anciens.
L’article L.1226-11 du code du travail qui donne également un mois à l’employeur pour reclasser ou licencier lie cette disposition à la suspension du contrat de travail et à la reprise.
« Article L1226-11 : Lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.
Ces dispositions s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail ».
La procédure engagée sans reprise n’a plus de garde-fou
Comment l’employeur détermine-t-il l’origine professionnelle ou non de l’inaptitude ? Mystère...
Une avancée : l’avis des DP est aussi demandé dans le cadre des inaptitudes d’origine non professionnelle. Cette avancée cache sans doute un souci de protection des employeurs en cas de contestation du caractère professionnel ou non d’une maladie ou d’un accident (si au final le caractère professionnel était reconnu après licenciement et que l’avis des DP n’était pas sollicité l’employeur se voyait infligé une pénalité de 12 mois de salaire). À présent, l’employeur est couvert et ne court plus ce risque.
Avancée : il n’y a plus de seuil d’effectif pour que le médecin du travail se prononce sur les capacités du salarié à suivre une formation pour se reclasser et, d’autre part, cette disposition qui n’existait auparavant que dans le cadre des inaptitudes professionnelles existe dans tous les cas d’inaptitude.
Reculs : la même disposition de formation sans seuil existe désormais en AT/MP mais en AT/MP cette formation visait à proposer un poste adapté dans l’entreprise. Désormais, cette formation vise à le préparer à occuper un poste adapté, sans indication si c’est dans l’entreprise donc ça peut être en dehors. De plus, la possibilité de mutation n’existe plus. Par alleurs, la possibilité d’aménager le temps de travail n’existe plus (introduite par la loi sur le handicap de 2005), que ce soit en inaptitude d’origine professionnelle ou non.
Question : l’indemnité temporaire d’inaptitude (code de sécurité sociale), qui permet au salarié victime d’un AT/MP de percevoir à nouveau des indemnités journalières pendant un maximum de 30 jours, pourra être touchée si la notion du mois suivant l’avis d’inaptitude succédant à une reprise du travail n’est pas respectée (hypothèse d’une inaptitude sans reprise). Elle ne peut pas non plus être perçue en cas d’inaptitude avec AT/MP sans arrêt de travail
Article D433-5 : « L'indemnité mentionnée à l'article D. 433-2 est versée par la caisse, à compter du premier jour qui suit la date de l'avis d'inaptitude mentionné à l'article R. 4624-31 du code du travail jusqu'au jour de la date de licenciement ou de reclassement du bénéficiaire, pour la durée maximale prévue à l'article L. 1226-11 du code du travail, dans les conditions prévues à l'article R. 433-14 ».
Procédure de l’inaptitude alourdie
- Constat par le médecin d’une éventuelle situation d’inaptitude à l’occasion d’une visite quelconque.
- Étude de poste obligatoire par le médecin du travail ou un membre de l’équipe pluridisciplinaire (article L.4624-4 CT : « Après avoir procédé ou fait procéder par un membre de l'équipe pluridisciplinaire à une étude de poste).
(Remarques : auparavant l’étude de poste figurait seulement en R.4624-31 CT qui parle aussi de conditions de travail ; seul le médecin du travail procédait à l’étude de poste – avancée de notre point de vue)
- Après l’étude de poste et des conditions de travail le médecin du travail échange avec le salarié, il échange aussi avec l’employeur : il peut alors délivrer l’avis d’inaptitude mais cette fois à l'emploi s’il constate qu’aucun aménagement du poste n’est possible. L'avis décline les capacités du salarié à occuper un autre emploi.
Question : si le poste entre dans les capacités du salarié mais que c’est un poste à aptitude, on délivre quoi ? on définit les capacités ou on donne une aptitude (ce que ne prévoit pas le texte ), on le fait en deux fois ? Mystère
Emploi et poste : un joyeux mélange
Le médecin du travail peut, lors de la délivrance de l’avis d’inaptitude à l’emploi constater avec la « mention expresse » que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi-
Dans ce cas, aussi bien en inaptitude non professionnelle que professionnelle l’employeur est délivré de toute obligation de reclassement.
Dans les autres cas l’employeur recherche un autre emploi adapté aux capacités de son salarié telles que définies par le médecin du travail.
- Il doit solliciter l’avis des DP (inaptitude d’origine professionnelle ou non)
- Il ne doit plus rechercher de mutation (groupe, établissement autre) ni d’emploi avec diminution du temps de travail (ce que permettent pourtant les aides AGEFIPH ni chercher à créer un emploi … : recul donc
On ne sait pas donc si l’employeur a un délai pour reclasser ou licencier puisque cela n’existe que dans la situation de reprise
- Si malgré ses recherches d’un autre emploi il n’a pas de solution de reclassement, l’employeur lui écrit et lui fait part de son impossibilité de reclassement (ca existait déjà en AT/MP mais pas en maladie, c’est donc désormais dans tous les cas)
- Si l’employeur a une solution de reclassement conforme aux préconisations du médecin du travail, et que le salarié refuse la proposition l’employeur est délivrée de toute obligation autre de reclassement (actuellement la cour de cassation oblige l’employeur pour les inaptitudes non professionnelles de faire de nouvelles recherches). C'est un recul
- Une précision : les fonds Agefiph sont aussi destinés au maintien dans l’emploi
- La contestation de l’inaptitude suit les mêmes voies de recours : Référé expertise prud’homale, expertise judiciaire par un expert- le conseil peut appeler le Médecin Inspecteur du travail lors du jugement de fond
Inaptitude et CDD
La loi travail aligne les dispositions sur les règles émises pour les CDI à l’exception du fait qu’en CDD on parle d’inaptitude après PERIODES DE SUSPENSION (notion supprimée en CDI) (article L1226-21 CT)
L’indemnité en cas de non recherche de reclassement ou de non reprise du CDD jusqu’à son terme si le salarié est non inapte à son emploi = le salaire restant à courir
Le recours contre l’avis du médecin du travail
Il y a des questions sans réponses …
L’expert judiciaire prend la place de l’inspecteur de l’inspecteur du travail. Cette voie de recours permet de sortir de l’anomalie que constitue le fait que l’inspecteur du travail et le ministre du travail revêtent la blouse du médecin sans en avoir le titre mais avec tous les pouvoirs (l’avis du médecin inspecteur du travail n’étant que consultatif).
Mais il reste de graves interrogations sur la procédure :
- Action contre qui ? Le salarié contre le médecin du travail ? mais celui-ci peut être extérieur à l’entreprise dans le cadre des SIST
- Action contre l’employeur du fait de sa contractualisation avec le SIST ?
- Action contre le salarié si l’employeur conteste l’avis ? mais le salarié n’y est pour rien et n’est pas partie au contrat avec le SIST.
Qui dit référé dit ensuite jugement de fond ! D’ailleurs le médecin inspecteur du travail peut être appelé par les juges de fond.
Il faudra combien de temps pour avoir un avis définitif ? qui paiera les frais d’avocat ??
On peut imaginer qu’il s’agisse d’une procédure spécifique mais la loi n’en dit mot. Elle indique seulement que les frais d’expertise ne seront pas supportés par la partie perdante dès lors que l’action en justice n’est pas dilatoire ni abusive. Mais de nouveau la question de, « qui sont les parties ? » reste pendante.
- Qui prend en charge le salarié qui a fait l’objet d’une restriction contestée par l’employeur ? On ne peut pas imaginer que le recours permette à l’employeur de suspendre les restrictions émises par le médecin du travail pour protéger le salarié.
A décharge on peut argumenter que cette problématique « temporelle » existe déjà dans la procédure actuelle puisque la contestation près de l’inspecteur du travail peut être suivie d’un recours gracieux au Ministre du Travail puis portée devant le Tribunal Administratif puis devant la Cour d’Appel Administrative et in fine devant le Conseil d’Etat. Ces différents recours ne sont dans la situation actuelle ni d’évidence, rapides ni gratuits Ces recours « administratifs » ne sont pas suspensifs des décisions que doivent prendre les employeurs. Ils ne devraient pas l’être non plus dans la nouvelle procédure de contestation.
Les Services de Santé au travail seront mis à contribution secondairement au civil par la partie à qui l’avis du médecin du travail faisait grief, et qui aura finalement réussi à contrarier cet avis.
Questions diverses
- Le travailleur handicapé qui ne s’est pas déclaré « handicapé » à l’employeur, affecté à un poste dit sans risques particuliers est vu aprés l'embauche alors qu’il aurait du être vu avant l'embauche par le médecin du travail : infraction automatique ?
- Le travailleur affecté à un poste sans risques se fait reconnaitre RQTH – est-il obligé de le dire à son employeur pour bénéficier d’une visite d’aptitude ?
- Le médecin du travail qui voit un travailleur handicapé (TH) « sans délais » car le salarié s’est déclaré TH à l’infirmière sera « dénoncé" à l’employeur
- C’est vrai aussi en cas de découverte d’une pathologie par l’infirmière. Cet envoi provoque de facto quelque part une rupture de la confidentialité car le salarié sera identifié par l’employeur : qu’est-ce que tu as ?
- Le salarié affecté à un poste sans risques particuliers, est victime d’un AT (alors qu’en principe ça ne devrait pas) : l’employeur est-il responsable ? il aurait dû identifier les risques et lui faire passer une visite d’aptitude ? Carton rouge ?
- Le salarié inapte et qui est salarié protégé peut contester l’inaptitude (délai !) en référé expertise) et son licenciement est soumis à autorisation mais que fera l’Inspecteur du Travail si l’inaptitude est contestée – il attend ? Combien de temps ?
- Cerise sur le gâteau pour le cas précédent, logiquement après l’expertise il y a jugement de fond, appel possible et cassation – l’Inspecteur du Travail attend toujours ? Enfin on peut contester la décision de l’Inspecteur du Travail – cela prendra 10 ou 15 ans ?
Pour conclure
Les Décrets sont attendus avec impatience. Ils seront (peut-être) l’occasion de rectifier certains aspects de la loi travail, en particulier pour ce qui concerne la santé au travail.
Le manque criant de dialogue social dans la rédaction de ce texte a des conséquences évidentes.
Espérons que les danseurs de ce tango mal maitrisé ne se prennent pas les pieds dans le tapis.
- Santé au travail parrainé par Groupe Technologia