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Contrats des chasseurs de mines : quels emplois demain en Belgique ?
L’appel d’offres pour la construction des 12 chasseurs de mines belgo-néerlandais arrive en phase finale, un choix étant désormais attendu courant février entre les trois consortiums en lice : Damen, Belgium Naval & Robotics et Sea Naval Solutions. Indépendamment des critères de prix ou technologiques, le gouvernement serait avisé de commencer par réfléchir aux intérêts des travailleurs belges, parmi des propositions qui n'offrent pas du tout les mêmes opportunités en la matière.
Dès qu’il est question de matériel militaire pour des sommes dépassant souvent plusieurs centaines de millions d’euros, les contrats passés entre un gouvernement et une ou plusieurs entreprises privées étrangères contiennent généralement des clauses de contreparties en termes d'emplois locaux, appelées « offsets ». L’idée, assez saine, est la suivante : quitte à dépenser des milliards d’euros d’argent public, autant que cela revienne au maximum à des travailleurs nationaux, y compris dans les cas où aucune entreprise nationale ne peut directement prendre les contrats en charge. Partenariats locaux, sous-traitance etc., peu importe la forme que cela peut prendre, les salariés du pays « client » doivent bénéficier de cette manne d’argent public. Mais pas n’importe quels emplois : la qualité du « travail délégué » doit primer. C'est souvent là que le bât blesse et que nos gouvernements se font avoir : le quantitatif et le court terme l’emportent sur la qualitatif et le long terme. Beaucoup d'emplois faiblement qualifiés tout de suite ne valent pas des emplois plus qualifiés à long terme, même en quantité moindre.
L’appel d’offres en cours pour des chasseurs de mines pourrait être l’illustration de cette logique : au-delà de la fabrication de la coque, un chasseur de mines, comme la plupart de bâtiments de guerre actuels, est surtout un concentré de technologies : systèmes de combat, communication, moyens de détection, drones… Assembler de la tôle n'est pas forcément un métier d'avenir en Belgique, alors que les technologies nécessaires pour faire fonctionner tous les systèmes embarqués nécessitent des compétences bien plus utiles au pays. Ce sont bien ces emplois que nous devons obtenir en priorité ; c’est précisément là que le gouvernement doit exiger des « retours sur investissement ». Les drones sous-marins, l’électronique de défense, les transmissions, les moteurs, les radars, les sonars, l’intelligence artificielle… Tous ces domaines sont porteurs et valorisables en matière de compétences et d’emploi sur le long terme. La découpe, la soudure et le fraisage peuvent se faire ailleurs, peut-être pas aussi bien mais probablement pour bien moins cher qu’ici. Rien ne sert de se battre pour des emplois non compétitifs.
Or, parmi les offres présentées, toutes les propositions ne se valent pas de ce point de vue. D’après nos informations, Damen proposerait un plan de coopération essentiellement centré sur l’industrie de la construction navale. Quel est l’intérêt de cette proposition pour les travailleurs belges ? L'industrie de la construction navale a quasiment disparu en Belgique ces dernières décennies, dans un contexte de concurrence effrénée non seulement en Europe mais aussi dans le reste du monde. C’est peut-être regrettable mais c’est ainsi. Faut-il vraiment ressusciter cette industrie et ces emplois du XXe siècle pour affronter la concurrence et la mondialisation du XXIe ? Déjà, qui peut croire qu’un programme de 12 chasseurs de mines (et 4 frégates) produits par Damen pourrait faire renaître l’industrie navale en Belgique ? Tout laisse penser en plus que ces navires seront essentiellement produits en Roumanie, où Damen dispose déjà d’un chantier naval opérationnel et de travailleurs bon marché. Au temps pour les emplois en Belgique, dans ces conditions ; qui peut réellement croire à la pérennité d’une telle industrie chez nous ? Allons-nous recevoir uniquement des miettes de ces programmes ? Que fera-t-on des salariés des chantiers une fois ce contrat terminé ? Qui paiera à long terme pour l’entretien de ces industries et la pérennité de ces emplois ? Le contribuable belge ? Sur la base de quel programme naval hypothétique ?
Le plan de coopération industrielle de Damen a donc tout d’un leurre, une façon pour Damen de garder pour lui l’essentiel de ce qui fait la valeur ajoutée, tout en laissant aux travailleurs belges le soin de passer la ramassette avec des emplois peu qualifiés et sans avenir. Sans oublier que ces emplois, pour limités qu'ils soient, sont de toute façon en large majorité à la destination de la Flandre, sans aucune considération pour la Wallonie ou pour Bruxelles.
Ce plan de coopération pourrait ainsi constituer une belle occasion manquée pour l'emploi. En effet, si l’on en croit quelques articles récents, d’autres candidats ont fait des propositions nettement plus consistantes sur le front de l'emploi, avec un plan de coopération beaucoup plus centré sur les technologies du futur (IA, robotique, cybersécurité…) et sur la création d’un à deux centres d’excellence en Belgique. Le tout avec une répartition des tâches et des emplois beaucoup plus équilibrée (35 % en Wallonie, 15 % à Bruxelles et 50 % en Flandre).
La question est donc la suivante : veut-on tenter de ressusciter des emplois disparus ou souhaite-t-on donner aux salariés belges de bonnes places pour l'avenir ? Voilà ce à quoi Charles Michel et à ses équipes vont devoir répondre. Quoi qu’il en soit, c'est bien eux qui seront redevables de la réponse apportée devant les travailleurs belges.
Dès qu’il est question de matériel militaire pour des sommes dépassant souvent plusieurs centaines de millions d’euros, les contrats passés entre un gouvernement et une ou plusieurs entreprises privées étrangères contiennent généralement des clauses de contreparties en termes d'emplois locaux, appelées « offsets ». L’idée, assez saine, est la suivante : quitte à dépenser des milliards d’euros d’argent public, autant que cela revienne au maximum à des travailleurs nationaux, y compris dans les cas où aucune entreprise nationale ne peut directement prendre les contrats en charge. Partenariats locaux, sous-traitance etc., peu importe la forme que cela peut prendre, les salariés du pays « client » doivent bénéficier de cette manne d’argent public. Mais pas n’importe quels emplois : la qualité du « travail délégué » doit primer. C'est souvent là que le bât blesse et que nos gouvernements se font avoir : le quantitatif et le court terme l’emportent sur la qualitatif et le long terme. Beaucoup d'emplois faiblement qualifiés tout de suite ne valent pas des emplois plus qualifiés à long terme, même en quantité moindre.
L’appel d’offres en cours pour des chasseurs de mines pourrait être l’illustration de cette logique : au-delà de la fabrication de la coque, un chasseur de mines, comme la plupart de bâtiments de guerre actuels, est surtout un concentré de technologies : systèmes de combat, communication, moyens de détection, drones… Assembler de la tôle n'est pas forcément un métier d'avenir en Belgique, alors que les technologies nécessaires pour faire fonctionner tous les systèmes embarqués nécessitent des compétences bien plus utiles au pays. Ce sont bien ces emplois que nous devons obtenir en priorité ; c’est précisément là que le gouvernement doit exiger des « retours sur investissement ». Les drones sous-marins, l’électronique de défense, les transmissions, les moteurs, les radars, les sonars, l’intelligence artificielle… Tous ces domaines sont porteurs et valorisables en matière de compétences et d’emploi sur le long terme. La découpe, la soudure et le fraisage peuvent se faire ailleurs, peut-être pas aussi bien mais probablement pour bien moins cher qu’ici. Rien ne sert de se battre pour des emplois non compétitifs.
Or, parmi les offres présentées, toutes les propositions ne se valent pas de ce point de vue. D’après nos informations, Damen proposerait un plan de coopération essentiellement centré sur l’industrie de la construction navale. Quel est l’intérêt de cette proposition pour les travailleurs belges ? L'industrie de la construction navale a quasiment disparu en Belgique ces dernières décennies, dans un contexte de concurrence effrénée non seulement en Europe mais aussi dans le reste du monde. C’est peut-être regrettable mais c’est ainsi. Faut-il vraiment ressusciter cette industrie et ces emplois du XXe siècle pour affronter la concurrence et la mondialisation du XXIe ? Déjà, qui peut croire qu’un programme de 12 chasseurs de mines (et 4 frégates) produits par Damen pourrait faire renaître l’industrie navale en Belgique ? Tout laisse penser en plus que ces navires seront essentiellement produits en Roumanie, où Damen dispose déjà d’un chantier naval opérationnel et de travailleurs bon marché. Au temps pour les emplois en Belgique, dans ces conditions ; qui peut réellement croire à la pérennité d’une telle industrie chez nous ? Allons-nous recevoir uniquement des miettes de ces programmes ? Que fera-t-on des salariés des chantiers une fois ce contrat terminé ? Qui paiera à long terme pour l’entretien de ces industries et la pérennité de ces emplois ? Le contribuable belge ? Sur la base de quel programme naval hypothétique ?
Le plan de coopération industrielle de Damen a donc tout d’un leurre, une façon pour Damen de garder pour lui l’essentiel de ce qui fait la valeur ajoutée, tout en laissant aux travailleurs belges le soin de passer la ramassette avec des emplois peu qualifiés et sans avenir. Sans oublier que ces emplois, pour limités qu'ils soient, sont de toute façon en large majorité à la destination de la Flandre, sans aucune considération pour la Wallonie ou pour Bruxelles.
Ce plan de coopération pourrait ainsi constituer une belle occasion manquée pour l'emploi. En effet, si l’on en croit quelques articles récents, d’autres candidats ont fait des propositions nettement plus consistantes sur le front de l'emploi, avec un plan de coopération beaucoup plus centré sur les technologies du futur (IA, robotique, cybersécurité…) et sur la création d’un à deux centres d’excellence en Belgique. Le tout avec une répartition des tâches et des emplois beaucoup plus équilibrée (35 % en Wallonie, 15 % à Bruxelles et 50 % en Flandre).
La question est donc la suivante : veut-on tenter de ressusciter des emplois disparus ou souhaite-t-on donner aux salariés belges de bonnes places pour l'avenir ? Voilà ce à quoi Charles Michel et à ses équipes vont devoir répondre. Quoi qu’il en soit, c'est bien eux qui seront redevables de la réponse apportée devant les travailleurs belges.
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