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19 / 09 / 2022 | 256 vues
Jacky Lesueur / Abonné
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« Le projet "Empreinte mutualiste" doit permettre d’objectiver et de mesurer la valeur ajoutée des actions » - Eric Chenut, FNMF

Dans le prolongement du Congrès et de l'Assemblée Générale de la Mutualité Française qui viennent  de se tenir à Marseille, Eric Chenut, Président de la FNMF, a bien voulu faire le point avec nous et répondre à nos questions.

 

 Quels sont les points marquants de votre première année à la présidence de la Mutualité Française ?

 

Depuis un an, nous avons résisté à de nombreux vents contraires que nous a su affronter collectivement. Nous avons promu le modèle mutualiste en alimentant le débat public par nos propositions sur l’ensemble du champ de la protection sociale, notamment en anticipation des élections présidentielle et législatives, avec une plateforme pour bâtir des protections sociales durables et asseoir une conception globale de la santé. Au début de l’été, nous avons contribué à la mission flash sur l’accès aux soins urgents et non programmés.


Face aux attaques relatives aux coûts de gestion et à l’augmentation des cotisations, nous avons fait œuvre de pédagogie. Nous avons rappelé le sens de la mutualisation des risques et expliquer les mécanismes de solidarité qui sous-tendent nos modèles de protection sociale. Et dénoncé l’instrumentalisation des travaux du Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance Maladie.


Cette agitation stérile masquait en fait de vrais problèmes comme le renoncement aux soins, les déserts médicaux ou l’état du système de santé. Pour autant, comme nous l’avons clairement affirmé, le statu quo n’est pas souhaité, souhaitable et possible : en matière d’accès aux soins, de prévention, de dépendance, de prévoyance, notamment, il y a fort à faire avec l’ensemble des acteurs.


C’est pourquoi nous sommes engagés avec les 64 organisations du pacte du pouvoir vivre et avec ESS France, pour créer les synergies nécessaires pour permettre aux gens de retrouver du pouvoir d’agir. Et c’est aussi pourquoi nous avons souhaité lever les freins prudentiels, règlementaires et fiscaux bridant l’action des mutuelles, des groupes et des unions, pour leur permettre de défricher des périmètres utiles aux populations.


Tout au long de cette année, je me suis attaché à faire valoir la singularité de l’action mutualiste, son sens et sa contribution à l’intérêt général et au bien-être de ses adhérents. Par la prévention, les soins et les accompagnements de toute nature, la Mutualité Française agit utilement pour l’ensemble de la société. Par leurs couvertures santé, prévoyance, épargne retraite et dépendance, les Mutuelles garantissent à leurs adhérents de ne pas être contraints par un aléa et de poursuivre leurs projets de vie. Être mutualiste c’est débattre, revendiquer, proposer, mais c’est aussi et surtout mettre en œuvre des solutions dans tous les territoires, innover, être utile à tous et à chacun. Je crois profondément à la pertinence du mode d’entreprendre participatif mutualiste face aux conséquences des transitions écologique, démographique et numérique en cours, qui sont tout autant des risques que des opportunités.

 

 En quoi la raison d’être que vous avez adoptée pourra-t-elle être utile pour renforcer la mutualité ?

 

Après un vote en Assemblée générale, la Mutualité Française a dévoilé sa Raison d’être lors de son congrès qui s’est tenu début septembre à Marseille : « Se protéger mutuellement aujourd’hui pour, ensemble, construire les solidarités de demain ». L’enjeu de la Raison d’être est d’expliciter la manière dont le mouvement mutualiste entend être utile à la société. Elle définit en quoi les mutuelles, les groupes et les unions qui constituent la Mutualité Française, apportent des solutions aux conflictualités et aux grandes transitions en cours qui affectent et affecteront le système de santé et de protection sociale.
 

Cette Raison d’être sera désormais inscrite dans les statuts de la Mutualité Française. Elle vient caractériser ses valeurs, son utilité sociale et ses principes d’actions. C’est sur ce mot d’ordre que s’est rassemblé le mouvement mutualiste autour de trois axes d’engagements qui sont autant de principes fondateurs de l’action des mutuelles, des groupes et des unions : militer dans tous les territoires en faveur du progrès social ; promouvoir un modèle d’entreprendre démocratique et solidaire au service de l’intérêt collectif ; apporter des solutions innovantes au service de la pleine santé et de la protection sociale durable de tous.
 

Le vote de la Raison d’être et de son manifeste marque l’aboutissement d’un travail de co-construction impulsé dès mon élection à la présidence de la Mutualité Française. Elus et salariés des mutuelles, acteurs mutualistes et partenaires, tous ont contribué à ce processus. Les mutuelles, groupes et unions feront désormais vivre la Raison d’être par des actions concrètes qui viseront à amplifier leur utilité sociale, pour une société plus solidaire. Il est de notre responsabilité de faire vivre le modèle mutualiste, un modèle plus que jamais pertinent dans un contexte où la protection sociale et l’accès aux soins pour tous doivent être défendus.

 

 

Vous avez annoncé une démarche relative à la mesure d’empreinte de l’action mutualiste sur la société. Pourquoi ?

 

A l’origine de cette démarche, il y a les élus et les salariés des mutuelles rencontrés lors du tour de France que j’avais effectué en amont de l’assemblée générale de l’année dernière. Tous me disaient leur impression que l’opinion publique et les pouvoirs publics ne percevaient pas précisément ce que nous faisions, notre différence et notre plus-value. Nous sommes souvent assimilés à une cotisation et à des prestations alors que nos actions recouvrent un champ bien plus large, avec la prévention, nos établissements de soins et d’accompagnement, les réseaux conventionnés, l’aide sociale et tous les dispositifs que les mutuelles et la Mutualité Française initient partout et pour tous dans les territoires.

 

Pour parvenir à mieux faire connaitre ce que nous sommes, au-delà de l’affirmation de ce qui fait l’identité mutualiste, je crois nécessaire de mener une réflexion sur notre empreinte en interrogeant comment, en tant que mouvement, nos activités contribuent aux biens communs pour l’ensemble de la société. Nous avons à mesurer en quoi et comment, par les solidarités, l’entraide, la santé, l’engagement, nous contribuons à l’émancipation individuelle et collective de celles et ceux que nous protégeons. Comment, par notre lucrativité limitée, notre mode d’entreprendre participatif, notre gouvernance démocratique, notre volontarisme, nous apportons notre pierre au maintien de la cohésion sociale.

 

Cette démarche de mesure de notre empreinte s’inscrit dans la continuation logique de l’expression de notre Raison d’être. Le projet « Empreinte mutualiste » doit permettre d’objectiver et de mesurer la valeur ajoutée des actions menées par le mouvement mutualiste, de valoriser son utilité sociale et sa spécificité. Ce sera l’occasion d’objectiver les externalités de la mutualité. Ce projet doit s’appuyer sur la définition et la mesure d’indicateurs simples, partagés et fiables de l’impact des activités de l’ensemble des acteurs mutualistes. A terme, il s’agit de démontrer comment un euro mutualisé par les adhérents crée de la valeur, au-delà de la redistribution prestataire, à travers la prévention, les établissements et services de soins et d’accompagnement mutualistes, les réseaux conventionnés, le tiers-payant, la relation adhérents… L’implication des mutuelles dans la mise en œuvre de cette démarche est un levier essentiel de succès. Elles y seront donc régulièrement associées.

 

Ce congrès a innové dans son format. Qu’en attendiez-vous ? Le résultat est-il à la hauteur de vos attentes ?

 

Nous retrouver à Marseille pour ce 43ème congrès de la Mutualité Française fut un réel plaisir alors que la pandémie que nous connaissons depuis 2020 avait contraint à décaler de plus d’un an ce rendez-vous. Nous avons souhaité un congrès à l’image de notre mouvement, un congrès foisonnant, lieu de rencontres et de débats avec nos parties prenantes. Un lieu pour penser et construire l’avenir de la santé et de la protection sociale, pour rechercher des solutions innovantes répondant aux crises et aux transitions majeures qui bousculent notre société. Nous avons fait le pari de la richesse et de l’intelligence collectives, pour laisser toute sa place à la participation des délégués, dans un état d’esprit dynamique et convivial, pour que s’exprime l’envie de faire et d’essaimer qui caractérise notre mouvement.

 

Nous avons voulu incarner un espace d’engagement pour de nouvelles solidarités, avec des thématiques variées couvrant un champ de la santé et de la protection sociale extensif ouvert sur la société et ses évolutions, par exemple en matière d’environnement, d’approche genrée de la santé ou de logement. Cette capacité de notre mouvement s’est incarnée tout d’abord dans les trois axes d’engagement qui accompagnent notre Raison d’être et qui constituent notre gouvernail. La résolution générale, très largement adoptée en conclusion du congrès, décline de façon à la fois plus détaillée et plus opérationnelle ces grands principes qui guident notre action. Enfin, l’avis rendu par la conférence citoyenne sur l’aide, l’entraide et les solidarités que nous avons organisée au quatrième trimestre de l’année dernière, n’aurait su rester sans réponse. La Mutualité Française s’est donc engagée sur des actions concrètes pour améliorer l’accès aux droits et leur effectivité, pour conforter les protections existantes et accompagner les personnes en situation de fragilité, pour développer de nouvelles protections face à de nouveaux risques.

 

Pour être au rendez-vous de la démarche collective qui nous a permis d’adopter notre Raison d’être, nous aurons à rendre compte, Assemblée générale après Assemblée générale, en toute transparence, de la manière de mettre en œuvre ces engagements. Ils se concrétiseront, au niveau national et dans les territoires, par une feuille de route qui les déclinera en actions politiques et opérationnelles, ainsi que la manière d’en rendre compte.

 

Ces travaux s’appuieront sur des initiatives et projets dans lesquels la fédération et le mouvement ont un rôle moteur, nous permettant ainsi d’accroitre notre impact sur la société.

 

En partageant régulièrement les progrès réalisés sur ces différentes actions, notre mouvement mutualiste améliore continuellement la pertinence de son modèle et apporte une contribution durable à une société plus solidaire, plus humaine et plus apaisée.

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