Organisations
La bombe à retardement du temps de travail à la mairie de Paris : une taupe à l’Hôtel de Ville
Une fuite d’un enregistrement édifiant gravé lors d’une réunion de direction s’explique sans doute par des oppositions, désormais déclarées, au sein même de l’administration parisienne
Une véritable petite bombe vient d’éclater sur la toile : la mise en ligne d’un long enregistrement de près de treize minutes gravé lors d’une réunion de cadres de la direction de la propreté et de l’eau de la Ville de Paris.
L’objet de cette réunion était la mise en place de la loi sur le temps de travail dans la fonction publique territoriale à Paris, votée en 2017, et qui aura pour conséquences de chambouler un certain nombre de cycle de travail, en sus de la perte de plusieurs jours de congés (sous forme de RTT). Cela inquiète les hauts fonctionnaires de la Ville de Paris qui anticipent déjà les difficultés à faire fonctionner les services municipaux sur l’ensemble de l’année, notamment en obligeant des agents à venir travailler sur leur congés, comme l’avoue l’un des participants.
En effet, l’application de cette loi va résulter sur la remise à plat de tous les cycles de travail à la Ville de Paris, cycles pourtant pas mis en place par hasard car de nombreux services de la ville fonctionne sept jours sur sept, trois cent cinquante jours par an (y compris les jours fériés), comme le service du ramassage des poubelles, le personnel des parcs et jardins, des équipements sportifs ou des gens en charge de la sécurité sur la voie publique. D’autres services municipaux ouvrent également sur des amplitudes de six jours par semaine, comme les mairies d’arrondissements, les bibliothèques, les conservatoires et les musées entre autres.
De fait, la fuite de cet enregistrement ensuite posté sur le web montre surtout la crainte de ces cadres parisiens sur ce qui va leur sembler être une véritable bombe à retardement social car si la ville de Paris clame « une légère perte de deux jours de congés annuels », tel n’est pas l’avis des participants de cette réunion dont l’un a fini par lâcher : « C’est clair, en fait, aujourd’hui, c’est virtuel, ça ne veut rien dire… Le jour où ça va heurter les agents, c’est quand on leur donnera leur planning de leur roulement annuel où ils verront quand ils ne seront pas chez eux, quand ils ne pourront plus partir en vacances…..C’est là en fait que ça va les toucher ». Ce haut cadre de pointer le cynisme de la mairie de Paris : « C’est toute la stratégie de la DRH, c’est-à-dire fixer une contrainte que je pense que peu de personnes comprennent pour le moment mais qui ensuite à la rentrée [NDLR : quand les premières projections vont arriver pour l’année prochaine], direction par direction, on appliquera en fait les cycles contraints par le catalogue de la DRH et qui sera bientôt votée au Conseil de Paris ». Avec bien des conflits sociaux en vue à la Ville qui retomberaient d’abord sur les cadres de terrain. D’où cette fuite, sans aucun doute organisée.
Depuis qu’Anne Hidalgo a lancé une chasse à la taupe pour débusquer le traître à la cause, il faut dire que la transcription de cette réunion pleine de vérités (mais aussi de cynisme) commence à faire tâche pour celle qui s’est autoproclamée future candidate socialiste à la présidentielle sur des valeurs de progrès social. Nul doute d’ailleurs qu’Audrey Pulvar a dû en être révulsée lors de cette écoute, la candidate socialiste pour la région Île-de-France au nom d’Anne Hidalgo, étant connue pour sa défense des valeurs de gauche. Bien sûr, le discours de la Ville de Paris en matière sociale n’est pas très fluctuat, voire carrément mergitur.