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07 / 10 / 2009 | 7 vues
Rémi Aufrere-Privel / Membre
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ECR: premier grand conflit du travail chez un transporteur ferroviaire privé

Le conflit qui a récemment débuté chez Euro Cargo Rail (ECR) est le premier grand conflit du travail chez un transporteur ferroviaire privé (fret) opérant en France.

Le 2 octobre dernier, s'est tenue une réunion de négociations ayant pour but, selon l'esprit de l'intersyndicale CFDT-FGAAC-CGT, de mettre un terme à la grève en cours.

Côté forme, la direction n'a pas hésité à opérer malicieusement, voire avec un peu d'irrespect, en commençant la rencontre avec un bon retard et en imposant des représentants syndicaux (CFTC-UPFP) en désaccord avec l'arrêt de travail de leurs collègues. La direction de l'ECR a pris le prétexte très discutable d'indiquer que cette rencontre était liée aux négociations d'accords d'entreprise. L'explication d'un dirigeant qui a préalablement indiqué qu'il ne discuterait jamais sous la menace d'une grève a été encore plus provocatrice.

Les syndicats CFDT-FGAAC-CGT sont intervenus longuement pour expliquer combien la non-volonté de discuter était un point majeur du conflit actuel. Sur le fond, les négociateurs ont abordé les sujets qui fâchent.

 

Groupe de travail sur l'interprétation de la Convention Collective Nationale(CCN)

Sur l'organisation du travail et les roulements, l'intersyndicale a demandé des engagements très concrets et une méthode permettant de sortir du conflit par le haut, notamment par la mise en place d'un groupe de travail sur l'interprétation de la Convention Collective Nationale (conclusif avant mi-novembre), qui devrait traiter de ce qui est interprétable, et donc immédiatement applicable, et de ce qui est soumis à interprétation (donc négociable).

Les dirigeants patronaux ont rajouté "ce qui a du sens en exploitation et ce qui n'a pas de sens en exploitation". Ce qui modère grandement le respect des dispositifs conventionnels existants. Les syndicats ont tenu à rappeler la durée normale du travail à respecter (35 heures par semaine et 7 heures par jour) et que "donc les interprétations porteraient sur les maximums permis, donc les imprévus".

La direction d'ECR a précisé que les planificateurs ne seraient formés sur la CCN qu'en fin d'année. Ce qui représente un danger pour les salariés selon les syndicats qui pèsent le risque d’un traitement très différencié selon chacun.

Astreintes, paniers, horaires de nuit et jours fériés

Les contreparties liées aux astreintes à domicile n'ont pas reçu de réponse concrète de la part de la partie patronale. Pour les syndicats, les contraintes sont identiques que l'on se déplace ou que l'on soit chez soi. Les salariés d'ECR ne sont toujours pas partiellement rémunérés pour certaines périodes où ils ont pourtant l'obligation de se tenir à disposition de leur employeur (temps entre deux appels).

Sur les paniers de jour et de nuit, les syndicats réclament simplement leur calcul sur le plafond de l'URSSAF sans qu'ils soient bloqués sur une somme fixe. Refus de la direction alors qu'il n'y aurait aucun surcoût pour l'entreprise, ce qui rend cette opposition patronale stupéfiante. Concernant les repas durant un R.H.R. (repos hors résidence), les restaurants actuellement conventionnés ne le seront plus, ce qui obligera le salarié à avancer la dépense. La direction a engagé l'abandon progressif du remboursement à la fiche, à hauteur de 20 euros nets. Le second effet dénoncé, c'est que les salariés risquent de devoir avancer certaines dépenses prises en charge par l'employeur avant d'être remboursés, avec un décalage de plusieurs mois.

Les dirigeants ont répliqué par l'étonnement, en expliquant qu'une entreprise comme ECR, avec ses 4 ans d'existence, ne pouvait prétendre à une revalorisation comme chez P.S.A., avec un siècle d'activité. Les heures nocturnes de travail ont fait l'objet d'une opposition frontale à la logique imparable. L'intersyndicale FGAAC-CFDT-CGT a revendiqué la norme, comme n'importe quelle entreprise, à savoir 25 % de majoration. Les dirigeants ont répliqué par l'étonnement, en expliquant qu'une entreprise comme ECR avec ses 4 ans d'existence ne pouvait prétendre à une revalorisation comme chez P.S.A., avec un siècle d'activité.

Ce qui revient à dire, selon les syndicats, qu'il conviendrait d'attendre un siècle pour appliquer les droits largement reconnus pour tous!

  • Au lieu des 25 % de majoration admis dans la plupart des entreprises, la direction a fixé une somme forfaitaire de 2 euros bruts de l'heure comme majoration correspondant à moins de 10 % du taux horaire d'un salarié à plus de 20 euros de l'heure. C'est largement en-dessous de la convention collective !

 

L'intersyndicale FGAAC-CFDT-CGT a confirmé que les dimanches et jours fériés doivent être organisés en roulement car le Code du Travail ne soustrait pas complètement l'employeur au "repos dominical". Si, comme dans la C.C.N., des repos périodiques (art.41.1) avec un samedi-dimanche, ou dimanche-lundi, avec des minimas, sont définis, cela s'explique par le fait que le travail dominical n'est pas commun (vie familiale...).

Or, sur ce point-là aussi, il est notable de confirmer que toute les entreprises, sans exception, indemnisent le travail le dimanche. Devant le blocage de la direction d'E.C.R., l'intersyndicale a déclaré qu'elle refuserait le troisième repos hors résidence (sur volontariat et soumis à accord d'entreprise).

  • Concernant l'encadrement et l'indemnisation des RHR consécutifs, les mesures proposées (10 euros bruts à compter du second RHR consécutif) ne répondent pas aux attentes et semblent même assez provocatrices par rapport à la contrainte d'une longue absence.


Sans omettre la limitation à 14 heures (durée maximale) du RHR et le "volontariat" pour le troisième RHR.

Sur ce point, les agents sédentaires semblent encore plus perdants parce qu'obligés de faire des RHR consécutifs au lieu d'être en situation de déplacement.

L'intersyndicale dénonce aussi l'utilisation de "l'affectation temporaire" avec des volontariats potentiellement sources d'abus de la part de la direction (sorte de RHR déguisés).

Enfin, sconcernant les arriérés de repos compensateurs, encore un litige important : ils seront décomptés individuellement d'ici le 15 novembre et une clarification sur le mode de calcul devrait bientôt intervenir.

Cette négociation est difficile pour cette nouvelle entreprise qui ne semble pas prendre la mesure complète, d'abord de l'existence de certaines références légales essentielles car relevant du Code du Travail, et des premiers éléments de la Convention Collective Nationale (partie règlement du travail) dont ECR participe pourtant pleinement à la négociation. Cela ne paraît pas être un oubli. Mais s'il s'agit d'une stratégie de "négociation" (rigidité et pourrissement), quel que soit le résultat du conflit actuel, cela porterait ombrage à la vraie volonté d'E.C.R. de participer au jeu de la politique contractuelle.

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