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09 / 11 / 2020 | 537 vues
Frédéric Souillot / Abonné
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Communication syndicale numérique : dans quelles conditions, à défaut d'accord d'entreprise ?

Un accord d’entreprise peut définir les conditions et les modalités de diffusion des informations syndicales au moyen des outils numériques disponibles dans l’entreprise (NTIC : nouvelles technologies de l’information et de la communication).

 

A défaut d’accord, les organisations syndicales présentes dans l’entreprise et satisfaisant aux critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance, légalement constituées depuis au moins deux ans peuvent mettre à disposition des publications et tracts sur un site syndical accessible à partir de l’intranet de l’entreprise, lorsqu’il existe (art. L 2142-6 du code du travail).

 

Ainsi, faute d’accord collectif, les syndicats ne peuvent pas utiliser la messagerie de leur entreprise. Ils ne peuvent pas non plus exiger cette possibilité de leur employeur. Autrement dit, la diffusion de publications et tracts syndicaux sur la messagerie électronique que l’entreprise met à la disposition des salariés n’est possible qu’à la condition, soit d’être autorisée par l’employeur, soit d’être organisée par voie d’accord d’entreprise.

 

L’utilisation par les syndicats des outils numériques mis à leur disposition doit être compatible avec les exigences de bon fonctionnement et de sécurité du réseau informatique de l’entreprise, ne pas avoir des conséquences préjudiciables sur la bonne marche de l’entreprise et préserver la liberté de choix des salariés de refuser ou d’accepter un message.

 

En l’absence d’accord, si l’entreprise a autorisé un syndicat en particulier à utiliser la messagerie professionnelle à des fins syndicales, il doit également l’autoriser à tous les autres syndicats présents dans l’entreprise, en vertu du principe d’égalité de traitement.

 

Dès lors que l’employeur a autorisé l’utilisation de la messagerie professionnelle à des fins syndicales, il doit s’assurer que les outils informatiques mis à la disposition des élus ou des mandatés préservent la confidentialité qui s’attache à l’exercice de leurs missions légales (Cass. soc., 6 avril 2004, n° 02-40498 : cette décision rendue à propos des autocommutateurs téléphoniques a pour vocation, par sa formulation générale, de s’appliquer à l’ensemble des nouvelles technologies de l’informatique et des télécommunications. Voir également Cass. soc., 4 avril 2012, n° 10-20845).

 

Le Conseil constitutionnel a jugé conformes à la Constitution les dispositions du code du travail exigeant un accord collectif sous prétexte que celles-ci n’opèrent pas de déséquilibre entre la liberté de communication des syndicats et la liberté tant de l’employeur que des salariés (Cons. Const., 27 septembre 2013, n° 2013-345 QPC). Cette solution s’explique dans la mesure où les syndicats disposent dans l’entreprise de panneaux d’affichage que les salariés peuvent librement consulter.

 

Dans une situation de covid-19, surtout si la majorité des salariés est en télétravail, la diffusion de la communication syndicale peut poser problème. Il conviendrait donc de plaider auprès de l’employeur que, spécifiquement pendant l’épidémie de covid-19, les salariés étant majoritairement en télétravail, le fait de refuser une communication syndicale électronique pourrait contrevenir à la liberté de communication des syndicats dans l’entreprise. En effet, en cas de covid-19, les syndicats ne peuvent plus communiquer dans l’entreprise via les panneaux syndicaux, les salariés étant éloignés de l’entreprise. La possibilité offerte à un syndicat de créer un site internet externe à l’entreprise ne permet pas, à notre sens, de pallier cette atteinte à la liberté de communication des syndicats dans l’entreprise.

 

Attention, l’employeur peut user de son pouvoir disciplinaire à l’encontre de la personne qui envoie des communications syndicales par voie électronique alors que cela n’est pas autorisé.

 

De même, commet une faute justifiant une mise à pied disciplinaire une déléguée syndicale qui utilise la messagerie électronique de l’entreprise pour la distribution de tracts syndicaux au-delà du quota autorisé par l’accord collectif (Cass. Soc., 19 mai 2010, n° 09-40279).

 

À défaut d’accord avec l’employeur, le syndicat, faute de disposer d’un intranet dans l’entreprise, peut toujours créer un site internet externe à l’entreprise dont l’accès se ferait au moyen d’un code d’accès pour les salariés. Le site internet extérieur à l’entreprise est soumis à une obligation de discrétion. Si un syndicat a le droit de communiquer librement des informations au public sur un site internet, cette liberté peut être limitée dans la mesure de ce qui est nécessaire pour éviter la divulgation d’informations confidentielles portant atteinte aux droits des tiers.

 

S’agissant des institutions représentatives du personnel (IRP), le code du travail n’envisage pas la possibilité pour eux d’utiliser l’outil informatique. La CNIL préconise d’appliquer les mêmes règles aux IRP que celles prévues pour les organisations syndicales.

 

Parenthèse : si l’employeur n’autorise pas les élus ou les mandatés à communiquer via la messagerie professionnelle pour des raisons syndicales avec les salariés, ceux-ci peuvent-ils utiliser une messagerie personnelle pour contacter les salariés sur leurs e-mails professionnels ?

 

Le procédé consistant à utiliser une messagerie personnelle (et mentionné dans l’objet « personnel et privé ») pour contacter les salariés directement sur leur messagerie professionnelle semble, faute d’accord avec l’employeur, être une pratique à éviter dans la mesure du possible tant que la Cour de cassation ne s’est pas encore expressément prononcée sur cette question.

 

La prudence impose de préalablement obtenir l’accord de l’employeur même si en faisant un parallèle avec l’envoi de courrier personnel dans l’entreprise, celui-ci ne peut être totalement interdit par l’employeur, sauf impératif de sécurité.

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