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13 / 05 / 2014 | 1 vue
Pascal Pavageau / Membre
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Plans industriels : « 34 » stratégies ne font pas une politique

Le 12 septembre 2013, le Président de la République a officialisé la mise en place de 34 « plans de reconquête industrielle ». Un point d’étape a été fait à l’Élysée le 7 mai 2014.

Les thèmes de chacun des 34 plans sont synthétisés par l’infographie accessible sur ce site. La validation des « feuilles de route », cahier des charges déclinant dans un calendrier précis des actions concrètes et les objectifs à atteindre, sera effective en juillet. À ce stade, 9 sont validées.  

Dès juillet 2013, notre confédération a défendu la nécessité de retrouver un État stratège et planificateur au service de la défense de l’industrie existante, de la réindustrialisation et des emplois correspondants. 

C’est notamment dans ce cadre que nous avons revendiqué le rétablissement d’un commissariat général au plan, ce qui s’est traduit par la mise en place du Commissariat général à la stratégique et à la prospective (CGSP) en 2013, ainsi que la création d’une banque publique pour l’industrie, que la Banque publique d’investissement (BPI) est censée instaurer[1].     

Bien entendu, les 34 thèmes des plans ont été décidés par le gouvernement et relèvent de sa responsabilité.

Certains des critères que notre organisation  a pu revendiquer ont été intégrés :

- se situer sur des secteurs présentant des perspectives d’emplois avérées (existants) ou réellement crédibles (nécessité d’une évaluation fiable et de politiques publiques d’accompagnement) ;

- partir sur des technologies que l’industrie française maîtrise ;

- développer des outils publics forts encadrant ces plans (recherche publique, ingénierie publique, BPI, programmes d’investissements d’avenir[2] etc). 

Incontestablement, les 34 plans industriels constituent autant de stratégies porteuses d’une nouvelle offre industrielle française et donc pouvant être génératrice de maintien et de développement d’emplois.

Sur le principe, la confédération FO était favorable à la démarche et a défendu que le nombre de plans soit conséquent (le gouvernement envisageait une dizaine de schémas industriels seulement). 

Pour autant, 34 stratégies ne font pas une politique industrielle. La question de la cohérence d’ensemble des dispositifs existants et donc de leur coordination se pose depuis des mois. Dès l’origine, en septembre 2013, notre confédération revendiquait un suivi coordonné des 34 plans avec les programmes des 14 filières industrielles et les opérations des deux programmes d’investissement d’avenir au sein du Conseil national de l’industrie[3]. Cette proposition a été retenue et annoncée par le Président de la République le 7 mai 2014. 

→ Comme nous l'avons défendu depuis sa revendication initiale4], la BPI doit être pilotée en intégrant et en se mettant au service des politiques publiques de l’État. La BPI doit accompagner la politique industrielle nationale, notamment pour soutenir les stratégies de développement de filières et donc les 34 plans. Le ministre de l’Économie et du Redressement productif a (enfin !) assigné ce rôle à la BPI lors de la réunion du 7 mai 2014. L’effet levier qu’elle génère, permet d’obtenir un financement des banques privés, des entreprises et des marchés sur l’économie réelle (donc sur l’investissement concret, l’activité et l’emploi). Sur les 34 plans, le gouvernement annonce 20 milliards d’investissements dont deux tiers privés.

Pour nous, les entreprises qui bénéficieront du soutien de la BPI (ou plus globalement d’aides publiques) au niveau d’un des plans industriels doivent être préalablement soumises à des engagements et des contreparties sur le maintien et le développement de l’emploi ainsi qu’en matière de négociations de salaires. L’État doit l’imposer, y veiller et le contrôler. Nous l’avons de nouveau indiqué au Président de la République et au Premier Ministre. C’est là toute la différence entre une intervention publique ciblée et une mesure générale où les « contreparties » sont virtuelles (cf le « pacte de responsabilité »). 

→ Pour nous, les feuilles de route doivent viser à (re-)constituer ou renforcer des filières industrielles porteuses d'emplois, imposer des stratégies associant les donneurs d’ordres et leurs sous-traitants et développer l'innovation technologique en France en faveur de l'emploi (y compris selon des logiques de réimplantations et relocalisations). 

C’est aussi pourquoi la confédération insiste pour que les plans ne s’adressent pas qu’aux grands groupes et aux entreprises de taille intermédiaire mais qu’ils associent les TPE et les PME/PMI. Le gouvernement s’y est engagé, l’État devant agir dans ce sens en lien avec les régions. 

Mobiliser les services, les moyens et les outils de la puissance publique au service de 34 ambitions industrielles autour de la construction d’une offre industrielle française d’avenir, capable de s’exporter et de maintenir et créer des emplois nouveaux constitue un impératif en matière d’intervention publique et répond, selon notre organisation, au rôle de l’Etat.

Cela ne peut fonctionner sans une coordination d’ensemble. C’est au CNI d’y veiller.Cela ne peut suffire sans y associer et lier les programmes des filières, les opérations des investissements d’avenir et les projets nationaux d’innovation[5].

Cela ne peut s’effectuer sans mettre la BPI et les programmes des investissements d’avenir au service du financement public de ses plans.

Cela ne peut maintenir ou créer des emplois sans imposer, dès les feuilles de route, aux entreprises concernées des engagements clairs et contrôlés selon une conditionnalité ciblée. 

C’est à partir de là qu’une véritable politique publique industrielle pourra alors s’établir. 

 

[1] cf article de février 2014 sur la BPI.
[2] Le programme d’investissements d’avenir (PIA, engagé en 2010, comprend 34,64 milliards d'euros. Il a été complété (annonce du Premier Ministre le 9 juillet 2013) selon un programme intitulé « investir pour la France » par un PIA 2 doté de 12 milliards d'euros.
[3] Artcle de février 2013. Le CNI a l’avantage d’être interministériel, de regrouper les différents acteurs publics (État et collectivités), la BPI, le Commissariat général à l’investissement, les 8 organisations syndicales et patronales représentatives et les acteurs des filières industrielles, du donneur d’ordres aux différents sous-traitants. De plus, c’est un lieu de simple concertation et non de négociation. Les décisions sont ensuite prises par le gouvernement et éventuellement le parlement et n’engagent aucun membre du CNI.
[4] Les différents artciles sur la BPI de 2010 à 2014.
[5] notre article de janvier 2014.
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