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22 / 01 / 2018 | 140 vues
Didier Cozin / Membre
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Affaire Vélib ou la parfaite illustration de l'obsolescence des procédures des marchés publics

Le mini-scandale Vélib 2018 illustre bien les errements de l'administration avec des procédures obsolètes d'appels d'offres publics : des concours de beauté avant d'emporter les marchés puis très souvent, le musée des horreurs (Vélib aujourd'hui) ou bien des surcoûts extraordinaires (le désamiantage de Jussieu dont les coûts ont été multipliés par 10 au fil du temps, les surcoûts de la construction de l'hôpital Pompidou ou encore, plus récemment, du palais de justice de la porte de Clichy).
Les procédures des marchés publics : piètre qualité et surcoûts au rendez-vous.

Comment la mairie de Paris a torpillé en toute quiétude son service (coûteux mais rustique et efficace) de partage de vélos en 2017 ?

En 2017, la mairie de Paris a décidé de changer de prestataire pour son service (dispendieux) de vélos en libre-service.

Après dix années de fonctionnement globalement positif, ce partenariat avec une grande entreprise française (JC Decaux pour qui le Vélib était surtout une vitrine du savoir-faire français) a été abandonné pour être confié, sans aucune réflexion, à une PME de Montpellier, Smoove. Cette PME n'avait évidemment ni les moyens humains, financiers ni même organisationnels pour développer un tel service (très difficile à rentabiliser sur une durée courte) à l'échelle de la région parisienne.

Vélib et Autolib : de vraies machines à perdre de l'argent

Un tout petit calcul économique aurait dû dissuader les services des marchés publics de la Ville de Paris d'attribuer cet important marché de services (qui nécessite aussi de très gros investissements) à une PME (qui faisait 8 millions de CA).

Petite leçon de calcul (pour un service qui coûtera au final de 150 à 200 millions d'euros si le naufrage du vélo partagé à Paris est évité).

Les rentrées d'argent (abonnements) : pour 300 000 abonnés en 2017 (mais au moins un tiers de perdu du fait des cafouillage du nouveau prestataire) l'entreprise peut espérer au mieux un CA de 10 millions d'euros (dont 20 % de TVA à rembourser à l'État).

Au niveau des dépenses à engager la liste est longue :

  • une taxe municipale pour occupation de l'espace public (à moins que l'entreprise n'en soit dispensée, ce qui serait injuste par rapport aux entreprises privées comme les cafés ou les parkings) ;
  • la masse salariale de 400 personnes environ (techniciens et administratifs), soit 25 000 € par personne, donc 10 millions d'euros pour les salaires ;
  • la construction de 1 600 stations Vélib : 3 semaines de chantier pour chaque station, soit 20 000 euros + 10 000 euros de matériel et de raccordements, soit 30 000 euros par station ; pour 1 600 stations, le coût pourrait être de 50 millions d'euros ;
  • la fourniture de 20 000 vélibs à 4 000 euros pièce (prix estimé des vélos JCDecaux), soit encore 80 millions d'euros ;
  • enfin, le coût des réparations, du remplacement et de la maintenance (8 000 vélibs volés chaque année), soit encore 400 euros par vélo et par an, soit 8 millions chaque année.

Il faudrait donc multiplier par 5 les tarifs pour espérer une (faible) rentabilité.

Au final, on peut donc estimer que ce service coûtera 20 millions d'euros par an en frais de fonctionnement pour un investissement (qui doit être amorti avant le prochain appel d'offres dans 15 ans) de 130 millions. Avec 10 millions d'euros de recettes prévisibles, Smoovengo n'atteindra sans doute jamais son point d'équilibre et parviendra au mieux à payer les salaires sans rembourser ses créanciers.

Vers une faillite du consortium Smoovengo ?

Smoovengo a emporté le marché sur JCDecaux du fait d'un prix plus bas de 4,7 %. Ce prix qui comptait pour 40 % dans le marché, risque d'être très élevé pour les Parisiens : la perte de l'usage du vélo en libre-service et la possible faillite du consortium Smoovengo qui laisserait les Parisiens sans vélos.

Ce fiasco de Vélib 2018 à Paris illustre bien les incohérences du système des marchés publics à la française : une prime à la mauvaise qualité, au moins-disant financier pour des marchés illusoires de qualité défaillante ou dépassant très largement les coûts initiaux malgré un affichage économique de façade.

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