Organisations
Égalité professionnelle et reconnaissance des métiers du care
Le dernier numéro (1) de La Revue de l’IRES (2) propose un dossier particulier sur la question du genre dans la régulation du travail, étudiée dans cinq articles de manière variée tant du point de vue des méthodes empiriques mobilisées que des perspectives d’analyse.
Deux axes d’interrogation sont ainsi abordés:
- la question de l’égalité professionnelle femmes-hommes
- et celle de la reconnaissance des métiers du care.
On trouvera notamment au sommaire de ce numéro:
- L’index de l’égalité professionnelle offre-t-il un panorama fidèle des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes ?
Pour mémoire, le gouvernement français a mis en place en septembre 2018 un ensemble de mesures pour réduire les écarts de salaire entre femmes et hommes. Parmi ces mesures, toutes les entreprises privées de plus de 50 salariés sont tenues de calculer l’index d’égalité professionnelle. Elles doivent atteindre un seuil minimal à cet index, sous peine de sanctions.
Quelle est véritablement l’efficacité de cet index pour rendre compte des inégalités de rémunération entre les femmes et les hommes?
Après avoir expliqué ses règles de calcul, les résultats des entreprises en 2020 sont analysés et les comparés avec les inégalités de rémunération femmes-hommes mesurées à l’aide d’autres indicateurs.
Un constat s'impose: l’indicateur d’écart salarial tel que mesuré par l’index a tendance à minimiser les inégalités réelles, ce qui résulte de l’exclusion de certains salariés, de la possibilité pour les entreprises de déclarer l’index comme non calculable, et des choix méthodologiques adoptés.
- L’égalité professionnelle : un impensé de la négociation collective sur le télétravail
En France, les politiques de télétravail sont souvent le fruit d’une négociation collective et les accords d’entreprise signés sur le sujet se sont multipliés depuis la pandémie. Cette enquête qualitative réalisée auprès de 18 entreprises permet de saisir l’évolution de la dynamique de négociation sur le télétravail sur la période 2020-2024 et d’interroger la (faible) prise en compte de la dimension égalité professionnelle, dans une perspective féministe sur les relations professionnelles. Cet article identifie trois approches – extensive, restrictive et minimaliste – du télétravail, fortement marquées par le secteur d’activité, et donc le genre et la qualification de la main-d’œuvre.
- Réduire les disparités et les coûts pour les finances publiques : vers un secteur public du care
Les services de prise en charge de la petite enfance et de la perte d’autonomie sont de plus en plus reconnus comme devant faire l’objet d’un « service public », au sens où ils renvoient à des besoins sociaux considérés comme légitimes.
Cet article se propose d’évaluer ce qu’il en coûterait, du point de vue des finances publiques, de substituer à l’organisation actuelle une organisation reposant sur une fonction publique du care permettant d’homogénéiser non seulement les conditions d’emploi mais également l’accès à ces services sur le territoire.
Pour offrir, dans le champ de la petite enfance et celui du grand âge, un taux de service identique à celui du 10e département le mieux doté, 183 000 emplois supplémentaires sont à créer, ce qui coûterait 7,9 milliards d’euros.
À travers ces estimations nous montrons que les coûts de l’organisation actuelle sont déjà largement supportés par les finances publiques et que l’affirmation d’un secteur public du care ne constituerait pas un investissement disproportionné.
- Mon travail le vaut bien ! Une consultation sur les métiers féminisés du soin et du lien aux autres
La consultation « Mon travail le vaut bien ! » menée entre fin 2021 et début 2022 a donné la parole à près de 7 000 professionnel·les des métiers du soin et du lien aux autres, qui ont pu expliquer la réalité de leur travail, sa complexité, ses conditions d’exercice et de pénibilité. Ce matériel est analysé à partir des critères du principe juridique « un salaire égal pour un travail de valeur égale », afin de mettre en lumière la sous-valorisation de ces métiers très féminisés. Complexité et technicité, responsabilités, qualifications et exigences organisationnelles sont ainsi détaillées, des verbatims enrichissant les données statistiques.
- L’étude du syndicalisme au prisme des dominations croisées
La mondialisation des activités de production, la tertiarisation de l’économie et les nouveaux modes de gestion de la main-d’œuvre ont modifié les conditions de représentation et de lutte des travailleuses et travailleurs. À travers une enquête sur les pratiques de la CGIL italienne dans le secteur du nettoyage, l’article montre en quoi la prise en compte des dominations croisées est féconde pour étudier les rouages de la représentation syndicale
- Réguler et pratiquer le (télé)travail à distance : syndicalistes et télétravail dans les services
Si le télétravail était utilisé dans certaines entreprises de services avant les années 2020, il semblait alors peu concerner les collectifs syndicaux. Or, lors de la crise sanitaire, voire après, des militant·es syndicaux et syndicales sont devenu·es, comme bien d’autres salarié·es, des télétravailleurs et télétravailleuses, et ont dû adapter leurs pratiques afin de poursuivre leurs activités dans un contexte professionnel et syndical modifié. Les auteurs de cet article ont mené une enquête collective sur les effets du télétravail sur les activités syndicales dans des entreprises de l’assurance et de l’assistance ....
Enfin, hors dossier, un dernier article montre comment les collectifs de travail et les collectifs syndicaux sont affectés par le télétravail, notamment depuis la crise sanitaire. L’enquête permet d’observer que le télétravail met à l’épreuve des collectifs syndicaux, obligeant les militants à modifier leur organisation et leurs pratiques dans un contexte d’alourdissement des tâches syndicales.
(1) Pour Télécharger le document
(2) La Revue de l’IRES, créée en 1989, est une revue pluridisciplinaire publiée par l’Institut de Recherches Économiques et Sociales, IRES.
Elle est destinée à nourrir la connaissance dans les domaines intéressant les organisations syndicales : marché du travail et politiques d’emploi, politique économique, revenus et protection sociale, conditions de travail et activité de travail, formes de rémunération et de gestion des salariés, relations professionnelles, mutations du travail. S’adressant aux chercheurs, praticiens et experts de différentes disciplines (droit, économie, gestion, histoire, sociologie, sciences politiques), l’IRES porte une attention particulière aux articles novateurs issus d’enquêtes empiriques ou mobilisant une méthodologie originale, ainsi qu’aux éclairages comparatifs internationaux