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Le syndrome NIMBY s’accentue en France, au détriment de l’intérêt général
Ils sont pour les lignes TGV pour désenclaver leur région mais contre les nuisances visuelles et sonores. À défaut pour le stockage des déchets nucléaires mais contre le fait qu’il se fasse près de chez eux. Entre les discours généreux et l’égoïsme individuel, les NIMBY se multiplient.
Souvent associé à une forme d’égoïsme ou d’hypocondrie, le terme NIMBY (« not in my backyard », en français « pas dans mon arrière-cours ») évoque un individu qui souhaite profiter des avancées technologiques qui bénéficient à la collectivité tout en refusant que l’intérêt général nuise à une partie de son bien-être. Ils ne sont pas nécessairement hostiles à l’infrastructure en tant que telle mais n’acceptent pas que celle-ci puisse modifier leur environnement.
En France, le phénomène ne cesse de gagner du terrain sous des formes très variées, comme le prouvent les créations de comités de riverains ou d’opposants, les pétitions, les manifestations (parfois violentes), les demandes de contre-expertises ou les campagnes médiatiques contre des projets contestés.
Ouverte fin 2016, la « salle de shoot » du Xème arrondissement parisien n’a pas fini d’opposer les habitants du quartier aux autorités locales. Si les premiers dénoncent l’augmentation des violences et des dégradations, les secondes soutiennent que ce n’est pas la salle de consommation qui pose problème mais plutôt sa capacité d’accueil insuffisante.
Un phénomène qui fait florès
Les grandes villes ne sont cependant pas les seules concernées. À Nonant-le-Pin (Orne), un projet de centre de stockage en profondeur de déchets automobiles a cristallisé les oppositions pendant plusieurs années. La décharge du groupe Guy Dauphin Environnement devait être implantée en plein cœur d’une région d’élevage de chevaux de course et de sport, d’où la mobilisation (efficace) des professionnels de la filière équine. En effet, deux cents opposants se sont réunis le 7 janvier 2017 pour fêter la fermeture définitive du site sur décision du Conseil d’État.
Autrement plus médiatisé, le cas de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes est désormais emblématique. L’« aéroport de la discorde » est justifié par ses partisans par le risque de saturation de l’actuel aéroport de Nantes Atlantique. Mais la vive opposition qu’il suscite ne désenfle pas et même le recours au referendum local s’est avéré incapable de porter ses fruits, le débat ayant repris de plus belle après la victoire des partisans du projet.
Le stockage géologique des déchets nucléaires est également source de crispations. Récemment, le projet Cigéo a ainsi fait l’actualité avec l’émergence d’une nouvelle ZAD. Après plus de vingt ans de recherche, ce dernier aura pour but de stocker à environ 500m de profondeur et dans le sous-sol argileux de la Meuse et de la Haute-Marne les déchets radioactifs de haute et de moyenne activité à vie longue que produisent, entres autres, l’industrie électronucléaire, la recherche, la Défense nationale, la médecine et l’industrie.
Mais les associations anti-nucléaires sont vent debout contre le projet, dont elles dénoncent les risques sanitaires et environnementaux.
Bruit de fond
La posture est difficile à comprendre car elle défie la logique écologique. Le principe du stockage géologique a en effet été retenu par la loi en 2006 comme étant la meilleure solution pour traiter les déchets radioactifs. En outre, selon l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, la couche d’argile vieille de 160 millions d’années permettrait « d’isoler durablement les déchets les plus radioactifs tant qu’ils présentent un risque ». Conçu de manière à être réversible, le projet permettrait aux prochaines générations de « prendre part aux décisions concernant le devenir du stockage et récupérer les colis en toute sûreté si elles décidaient de changer de stratégie sur la gestion des déchets ».
Bien que leur position soit minoritaire parmi les associations écologistes et qu’ils peinent à proposer des alternatives, les anti-nucléaires se lancent mordicus dans la bataille contre Cigéo. Peine perdue ? En attendant, le projet avance, sous le haut commandement de l’Autorité de sûreté nucléaire. Demeure, en provenance des opposants au projet, un bruit de fond persistant, représentatif du phénomène NIMBY.
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la réalité, ne pas la regarder dans un miroir