Organisations
Syndicalisme, sympathisants et extrême droite
Tout d’abord, un sympathisant n’est pas un adhérent et encore moins un militant. Mais renversons la question : de quel syndicat un sympathisant du Front National peut-il se sentir proche ?
Certaines confédérations syndicales soutiennent régulièrement l’action ou les candidats de partis politiques (allant jusqu’à donner des consignes de vote), plusieurs de leurs membres cumulant d’ailleurs responsabilités syndicales et politiques.
De son côté, Force Ouvrière, du fait de son indépendance, n’affiche ni faveur ni proximité envers quelque parti politique que ce soit. On comprend donc mieux comment, avec des valeurs pourtant fondamentalement incompatibles avec l’extrême droite, Force Ouvrière se retrouve parfois citée par des sympathisants frontistes interrogés téléphoniquement sur leurs proximités syndicales, si tant est qu’ils se sentent proche d’un syndicat.
- Selon un sondage IFOP 2014, 33 % des sympathisants de FO votent pour le FN.
Notre indépendance
Certains reprochent alors à Force Ouvrière de se cacher derrière la charte d’Amiens pour ne pas prendre position contre le Front National. Pourtant, l’exigence d’indépendance vis-à-vis du politique que pose ce texte fondateur du syndicalisme français * est l’unique garantie, pour tous nos adhérents et militants, pour tous ceux qui votent FO, que nos revendications et notre signature ne font l’objet d’aucune collusion, d’aucune entente avec un parti et sont ainsi totalement affranchies du jeu politicien faisant rage entre ces derniers.
En clair, les positions de FO ne seront jamais mises en sourdine sous prétexte que ce seraient des amis qui tiennent le manche. Nous représentons les travailleurs, uniquement les travailleurs, et nous nous imposons de le faire sérieusement.
Pour s’assurer de cela, le règlement de Force Ouvrière va jusqu’à interdire, aux membres du bureau confédéral et de la commission exécutive, tout cumul de responsabilités politiques et syndicales. C’est une question de potentiel conflit d’intérêts entre mandats, et outrepasser cette règle est synonyme de démission. De même, aucun adhérent FO ne peut se présenter à une élection politique en utilisant le sigle FO.
Cette indépendance peut amener des électeurs de tout bord à voter FO aux élections professionnelles lorsqu’ils ne s’abstiennent pas. C’est d’ailleurs l’ensemble du mouvement syndical européen qui est confronté à une augmentation du vote extrême droite parmi les sympathisants, comme le connaît l’ensemble de la société aujourd’hui, et le milieu travailleur (dans les zones à taux de chômage élevé) en particulier.
L’extrême droite gagne du terrain électoral. Sa progression montre ainsi l’incapacité croissante des partis dits « classiques » à convaincre les électeurs, voire leurs partisans.
C’est dans ce contexte que plusieurs organisations syndicales autre que FO se sont mobilisées le 5 juin, pour barrer la route à l’extrême droite. Ces syndicats viennent ainsi en renfort de partis politiques qui, en refusant d’écouter et d’entendre les travailleurs, se sont volontairement coupés d’une source d’expression et de représentation du monde salarié. C’est cet isolement, cette fracture, cette déroute idéologique, qui constitue aujourd’hui le principal terreau de l’extrême droite.
Dans ce climat préoccupant, Force Ouvrière refuse d’entrer dans un jeu de communication qui espère régler la question par un simple affichage de bonnes intentions. Le débat politique meurt aujourd’hui de ce double discours permanent : entre le projet vendu et la réalité des décisions politiques, entre la justification de ces décisions et leurs conséquences.
* Alors seule confédération, la CGT a adopté lors de son congrès en 1906 la charte d’Amiens, qui précise : « La CGT groupe, en dehors de toute école politique, tous les travailleurs conscients de la lutte à mener pour la disparition du salariat et du patronat […] Les organisations confédérées n'[ont]pas, en tant que groupements syndicaux, à se préoccuper des partis et des sectes qui, en dehors et à côté, peuvent poursuivre en toute liberté la transformation sociale ». C’est la remise en cause de la charte d’Amiens au sein de la CGT, qui a motivé, en 1948, la création de la CGT-FO.