Référent « harcèlement » : quels pouvoirs, pour quelle efficacité ?
Un référent en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes doit être désigné par le CSE parmi ses membres, sous la forme d’une résolution adoptée à la majorité des membres présents, pour une durée qui prendra fin avec celle du mandat des membres élus du comité (art. L 2314-1 du code du travail).
Comme les membres du CSE ou, le cas échéant, les membres de la commission de santé, sécurité et conditions de travail, ce référent doit être formé à l’exercice de ses missions en matière de santé, de sécurité et des conditions de travail.
Les salariés doivent être informés de l'adresse et du numéro d'appel de ce référent sur les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où l’embauche se fait, ce par tout moyen.
Dans le cadre du règlement intérieur du CSE avec l’accord de l’employeur ou dans un accord de droit syndical la possibilité, notre organisation syndicale recommande à ses structures de prévoir d’étendre la mission de ce référent à toute forme de harcèlement (moral ou sexuel).
- Parallèlement au référent harcèlement du CSE, les employeurs dans les entreprises d’au moins 250 salariés doivent désigner un référent chargé d’orienter, d’informer et d’accompagner les salariés en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes (art. L 1153-5-1 du code du travail).
À noter que le seuil d’effectif de 250 salariés doit être calculé selon les règles prévues à l’article L 130-1 du code de la Sécurité sociale. Le franchissement à la hausse du seuil d’effectif ne sera pris en compte que lorsque ce dernier aura été atteint ou dépassé pendant cinq années civiles consécutives.
Comme pour le référent harcèlement « CSE », l’adresse et le numéro d’appel du référent « employeur » doivent faire l’objet d’une information par tout moyen, à la destination des salariés, sur les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où l’embauche se fait.
- Concrètement, le référent « employeur » peut être le DRH, un responsable des ressources humaines ou un membre de ce service ou encore un salarié chargé de la prévention des risques psychosociaux dans l’entreprise.
De manière générale, le CSE occupe une place centrale en matière de prévention du harcèlement. En effet, il peut initier toute démarche qu’il estime utile et proposer des actions de prévention, notamment en matière de harcèlement moral, de harcèlement sexuel et d’agissements sexistes. Si l’employeur refuse les actions proposées, il doit motiver sa décision.
Le CSE peut :
- régulièrement procéder à des inspections et effectuer des enquêtes en matière d’accidents du travail ou de maladies professionnelles ou à caractère professionnel. Il peut faire appel au concours de toute personne de l’entreprise qui lui paraîtrait qualifiée, à titre consultatif et occasionnel ;
- faire appel à un expert agréé lorsqu’un risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l’établissement ;
- exiger une expertise dès lors que les conditions de travail imposées aux salariés leur font courir un risque grave pour leur santé physique ou mentale.
Enfin, le CSE dispose d’un droit d’alerte dans les entreprises d’au moins 50 salariés. Si un membre de la délégation du personnel au CSE constate (notamment par l’intermédiaire d’un travailleur) qu’il existe une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique ou mentale ou aux libertés individuelles dans l’entreprise qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché, il en saisit l'employeur immédiatement. Cette atteinte peut notamment résulter de faits de harcèlement sexuel ou moral. Sans délai, l’employeur doit alors procéder à une enquête avec le membre de la délégation du personnel du comité et prendre les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation.
En cas de carence de l’employeur ou de divergence sur la réalité de cette atteinte et à défaut de solution trouvée avec l’employeur, le salarié (ou le membre de la délégation du personnel au comité si le salarié intéressé averti par écrit ne s’y oppose pas) peut saisir le bureau de jugement du conseil de prud’hommes qui statue selon la forme des référés. Le juge peut ordonner toutes les mesures propres à faire cesser cette atteinte et assortir sa décision d’une astreinte qui sera liquidée au profit du Trésor.
Parallèlement à tous ces moyens d’action, le CSE doit être consulté sur le règlement intérieur, ce dernier devant rappeler les dispositions relatives au harcèlement moral et sexuel prévues par le code du travail.
Il est bon également de rappeler que l’employeur est soumis à une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de santé et de sécurité des travailleurs.
Face à une situation de harcèlement sexuel ou moral, l’employeur ne peut se contenter de sanctionner le harceleur par un simple avertissement, il doit prendre des mesures pour éloigner l’auteur du harcèlement du poste occupé par le salarié victime des faits de harcèlement. Dans le cas contraire, l’employeur manque à son obligation de sécurité (Cass. soc., 17 février 2021, n° 19-18149).
L’employeur est responsable des agissements de harcèlement sauf s’il justifie avoir pris toutes les mesures de prévention nécessaires et que, informé de l’existence de tels faits susceptibles de constituer un harcèlement, il a pris les mesures immédiates propres à le faire cesser (Cass. soc., 1er juin 2016, n° 14-19702).
L’employeur qui est alerté de faits susceptibles de constituer un harcèlement doit prendre toutes les mesures utiles pour vérifier les faits allégués, notamment en procédant à une enquête. S’il ne le fait pas, il contrevient à son obligation de sécurité quand bien même les faits de harcèlement ne seraient pas établis. En effet, la Cour de cassation distingue l’obligation de prévention des risques professionnels de la prohibition des agissements de harcèlement moral, ces deux notions ne se confondant pas (Cass. soc., 27 novembre 2019, n° 18-10551).