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11 / 09 / 2023 | 150 vues
Jean-Claude Delgenes / Abonné
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Prévention du risque routier professionnel : votre entreprise est-elle dans les clous ou roule t’elle sur les trottoirs ?

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Selon l’Assurance Maladie, en 2021, 604 565 personnes en France ont été victimes d’accidents du travail, dont 645 accidents mortels. Les accidents et la mort au travail constituent un phénomène social massif (1) qui concerne d’abord des ouvriers et des hommes. En effet de profondes inégalités sont constatées à ce sujet. Les ouvriers sont sept fois plus souvent victimes que les cadres d’accidents du travail qui entrainent un handicap permanent. Ils risquent cinq fois plus de mourir au travail. Par ailleurs les hommes représentent 90% des décès. Ce constat se retrouve aussi en ce qui concerne les maladies professionnelles. Celles-ci frappent avant tout les milieux populaires, les ouvriers et les employés. Elles sont 17 fois plus élevées chez les ouvriers que chez les cadres. Les femmes ouvrières étant les plus touchées par les troubles musculosquelettiques (2) Réduire le nombre d’Accidents du travail, de Maladies professionnelles, et enrayer ces inégalités constitue un enjeux considérable pour notre société.


Pour relancer la résorption de ce fléau, les pouvoirs publics ont lancé un quatrième Plan santé au travail qui court de 2021 à 2025, et concerne aussi les risques liés aux déplacements professionnels car parmi tous ces décès un grand nombre ont lieu sur la route. Le risque routier 21%, devant la manutention manuelle 18% et les chutes hauteur 13%, s’avère en effet la principale cause d’accidents mortels. Ce ratio est constant il était par exemple de 20% en 2020.


Sur ce plan les entreprises doivent largement progresser pour mieux prévenir les risques routiers et réduire le nombre de blessés et de morts. Elles participeraient aussi se faisant à un effort national qui doit se poursuivre car faut-il le rappeler il y a eu l’an passé encore 3267 personnes qui ont perdu la vie sur la route. « Cette prévention du risque routier n’est pas aussi simple qu’il y parait car elle doit combiner toutes une séries d’actions dont la cohérence assure une prévention efficace ».

Une nécessaire prise de conscience

Pour les entreprises et les services publics, les enjeux liés au risque routier sont considérables, tant sur le plan humain que financier. Étant donné l’importance des préjudices, il est indispensable de prévoir une série d’actions congruentes pour limiter l’exposition aux risques.


Une des premières conditions passe par la conscience du chef d’entreprise ou du manager. Cette introspection peut être alimentée par des actions d’analyse à la suite d’accidents survenus par le passé. Pour nourrir cette réflexion, les représentants du personnel et la médecine du travail peuvent rappeler au dirigeant qu’il doit garantir la santé et la sécurité des agents au travail en mobilisant des moyens renforcés dans ce but.  Bien sûr, les chefs d’entreprise doivent prendre les mesures pour former leur personnel. Ces informations, formations, analyses et mises à disposition de matériel font l’objet d’une présentation régulière dans le Document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP).

Des déplacements à penser et analyser

La réalisation d’une cartographie précise des déplacements, l’identification des véhicules concernés, des durées envisagées et des conditions de trajets sont au cœur de l’analyse qui favorise l’affectation des moyens et des salariés en cohérence. Ainsi, pour un parcours de longue durée, on évite de mobiliser un conducteur ayant déclaré des douleurs dorsales. De même l’analyse et la programmation de l’activité doivent tenir compte des embouteillages, des nécessités de repos, des aléas multiples… Une planification trop tendue et une évaluation des phases de travail trop rigide génèrent en aval un stress chronique et une prise de risque dans la conduite souvent éreintante et dangereuse. En cela, il serait utile que les retours du terrain soient réalisés régulièrement. L’analyse des incidents et presque accidents apportera alors matière à la direction et aux représentants du personnel pour corriger les situations délétères de travail.


La nécessité du respect du code de la route qui doit faire l’objet d’un rappel régulier, ne suffit pas si le conducteur fait face à une charge de travail l’obligeant à prendre des risques, en particulier en roulant à une vitesse excessive. Il y a un lien direct entre l’augmentation de la vitesse moyenne et la probabilité d’un accident. La mise en débat du travail réel est donc toujours bénéfique, car elle permet de desserrer l’étau de ces injonctions contradictoires : respecter les règles du code de la route, et tenir des délais de déplacement impératifs et peu flexibles.

La gestion des véhicules

L’achat ou la location des véhicules doit retenir des véhicules équipés :

1. D’airbags et de ceintures de sécurité pour tous les passagers
2. D’un contrôle électronique de stabilité afin de maitriser la trajectoire
3. Des renforcements de la carapace pour les chocs frontaux et latéraux en conformité avec les
normes recommandées par les Nations Unies


L’entretien des véhicules, le renouvellement de la flotte, ou sa location doivent se mener dans un étroit dialogue avec les utilisateurs qu’il convient de responsabiliser à cet effet pour assurer une traçabilité. Des pneus commençant à être lisses, ou peu adaptés au contexte hivernal, des freins montrant des signes de faiblesse, un éclairage défaillant… peuvent échapper à des visites de maintenance. Avant de prendre la route, le conducteur s’assure de l’état de son véhicule et arrime toutes les charges afin d’éviter qu’elles se détachent en cas de choc.


Pour les déplacements en deux-roues, les salariés seront équipés d’un casque et d’un gilet fluorescent pour se faire voir des autres. En cas de panne sur l’autoroute, il convient de rappeler qu’il est interdit pour les piétons de déambuler sur la voie et qu’il faut se positionner derrière les rambardes de sécurité. En effet la durée de survie sur une autoroute est de l’ordre de vingt minutes…

Evaluer l’aptitude des salariés

L’appréciation et le maintien de l’aptitude des salariés à la conduite ne sauraient se résumer à la seule possession du permis de conduire. « S’aventurer sur les routes c’est s’exposer au danger ! ». En effet, plusieurs facteurs entrent en jeu : la sécurité des routes et des accotements, les erreurs des autres conducteurs, voire la défaillance du véhicule. Néanmoins, ces risques sont nettement accrus en cas de conduite sous grande fatigue, ou sous l’emprise de l’alcool ou de substance psychoactive (cannabis, LSD, etc.).


Selon l’OMS, le risque d’accident augmente sensiblement à partir d’un taux d’alcoolémie de 0,04 g /dl. Le risque d’accident mortel chez les conducteurs qui ont consommé des amphétamines est quant à lui multiplié par cinq. L’employeur doit donc, outre les informations et formations sur ces risques, proposer des équipements adaptés pour sensibiliser aux risques de l’endormissement et des conduites addictives. Des lunettes de simulation permettent notamment de mettre en évidence les effets néfastes de l’alcool, de la fatigue ou des stupéfiants.


Enfin, l’organisation préalable des déplacements donne des marges de sécurité aux conducteurs. Savoir se diriger au mieux est une garantie de garder toute son attention pour la conduite. Très souvent, des accidents surviennent par manque d’attention, en raison du déplacement du centre d’intérêt vers la recherche d’informations pour guider son déplacement.

Les soins après un accident

Les retards dans la fourniture des soins aux blessés augmentent la gravité des traumatismes. En situation d’urgence, chaque minute compte et de bons gestes peuvent faire la différence. Les employeurs devraient en cela former tout leur personnel roulant aux soins préhospitaliers et aux gestes qui sauvent. L’objectif : permettre aux salariés de valider la partie théorique du PSC 1 (Prévention et secours civiques de niveau 1).


Pour conclure, la prévention des risques passe aussi par la prise de conscience qu’un grand nombre de déplacements peuvent être annulés au profit d’échanges en vision conférence. Le confinement de mars 2020 avec son effet d’apprentissage massif du télétravail a permis à la population active de gagner dix ans de maturité dans les usages numériques. Gageons qu’un meilleur usage des déplacements professionnels profitera à la santé des salariés, mais aussi à l’environnement.


Haro au portable !


Sur la route, le temps passé à conduire peut paraitre long et improductif, surtout quand des objectifs à tenir se font pressants pour le conducteur. Il convient de rappeler la nécessité de toujours regarder la route et de ne pas communiquer au volant avec un téléphone. L’usage d’un portable allonge les temps de réaction de freinage et de prise en compte des signaux de panneaux routiers. Il compromet le respect des bonnes distances de sécurité avec le véhicule qui précède et peut inciter à des changements de trajectoire sur la voie de circulation. Un accident sur 10 est associé à l’usage du téléphone au volant et sur autoroute 16 % des accidents mortels lui sont imputables. L’employeur doit mettre en place des moyens de supervision et de contrôle pour éviter les communications lors des déplacements routiers.



(1) Voir l’observatoire des inégalités
(2) idem

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