Les effets des réformes des retraites sur les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers
Plusieurs éléments ressortent de la dernière étude de la Caisse des dépôts et consignation (CDC), venant d’être publiée et portant sur les fonctionnaires territoriaux et hospitaliers affiliés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locale (CNRACL). Dans le contexte actuel, il tombe une nouvelle fois à point nommé pour relancer ce débat éminemment sensible.
Plusieurs réformes paramétriques ont été mises en œuvre pour rééquilibrer les finances des régimes de retraite. Les réformes de 2003, 2010 et 2014 ont concerné à la fois les agents publics et les salariés du privé. L'un de leurs objectifs communs a été de repousser l’âge effectif de départ à la retraite pour diminuer le nombre de retraités. Pour ce faire, elles ont modifié certains paramètres, tels que la durée d’assurance pour liquider à taux plein, ainsi que l’âge de départ en retraite.
Si les effets de ces différentes mesures se sont cumulés, on peut isoler ceux des mesures incitatives et des effets des mesures contraignantes.
- Les mesures dites « incitatives » (celles qui n’empêchent pas de partir à la retraite mais affectent le niveau de pension) ne fonctionnent pas réellement. Cela indique que les Français ne souhaitent pas ou plus probablement ne peuvent pas repousser leur départ à la retraite. Les raisons sont nombreuses et sûrement principalement liées à leur état de santé. Ainsi, l’argument parfois avancé par les gouvernements supposant que les Français doivent être « encouragés » à partir plus tard parce que certains souhaiteraient travailler plus alors que le système actuel ne le leur permettrait pas, est mis à mal et se trouve être complètement en dehors des réalités de travailleurs français. À ce sujet, rappelons deux éléments : d’abord une étude récente de l’INSEE qui indique que si la mortalité a tendance à baisser de génération en génération, pour celles nées entre 1941 et 1955, elle stagne à l’âge adulte et une tribune de médecins s’inquiétant que la santé des jeunes des pays industriels soit moins bonne qu’il y a cinquante ans (voir sources ci-dessous). Dans ce contexte, il n’est pas étonnant qu’un départ à la retraite retardé, ne soit ni souhaité, ni souhaitable
- Les mesures « contraignantes », (qui obligent à repousser l’âge de départ), ne laissent donc pas aux Français le choix de prendre leur état de santé en compte. Elles touchent davantage le prolongement de la durée de travail mais leur ampleur reste limitée : on parle d’un allongement de 2 à 5 mois. Quel est donc l'effet réel de ces mesures en termes d’économie ? Cet effort budgétaire vaut-il les tensions sociales et la baisse de la qualité de vie des citoyens ? Comment s’articule-t-il avec les dépenses supplémentaires en matière de santé (arrêt maladie prolongé etc.) ?
Maintes fois rappelé par Force Ouvrière, le problème des inégalités est ici mis en lumière. Lors d’une présentation vidéo de l’étude, les chercheurs ont remarqué que les leviers « contraignants », tout en se montrant globalement plus « efficaces » (sic), posent une question de justice sociale puisque l’analyse détaillée montre que les principaux efforts (en termes de report des départs) sont réalisés par les salariés les moins élevés hiérarchiquement (catégorie C) et ayant commencé à cotiser le plus tôt. Ainsi, toutes les catégories sociales ne sont pas affectées de la même manière et les travailleurs avec les plus faibles salaires (donc les retraites les plus faibles) et les conditions de travail les plus difficiles voient leurs carrières prolongées.
À ce sujet, il convient de souligner que l’étude ne concerne que les fonctionnaires, c’est-à-dire souvent des carrières complètes et ininterrompues. Comme expliqué par FO depuis le début des débats, la réforme telle qu'actuellement voulue par le gouvernement ne prend pas les carrières interrompues en compte, ni les difficultés qui se multiplient ces dernières années pour les travailleurs (chômage, maladie, multiplicité des carrières au cours d’une vie, maternité etc.), amplifiées par la crise actuelle. L’allongement de la durée de travail mènera donc à plus d’inégalités et de précarité.
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