Former chaque salarié 100 heures : une exigence sociale dans la loi depuis 2014
Depuis le début du XXIe siècle, notre pays tente de faire monter les travailleurs en compétences en développant leur formation.
En 2014, les pouvoirs publics ont repris le DIF (de 20 heures annuelles de formation) à leur compte mais, en contrepartie, ont posé que les employeurs (de plus de 50 salariés) formeraient chaque salarié durant une centaine d'heures sur le plan de formation et pendant une durée de six années.
Cette obligation de formation (qui s'ajoute aux deux anciennes obligations : les formations obligatoires et les formations d'adaptation au poste) arrive à échéance en mars ou en décembre 2020 dans toutes les entreprises de plus de 50 salariés.
- En 2004, le droit individuel à la formation (DIF) devait permettre à chaque salarié de développer ses compétences durant 20 heures par an, il n'en a rien été.
- En 2013-2014, les partenaires sociaux ont proposé à l'Etat de nationaliser le DIF pour en faire un compteur personnel de formation (CPF), portable tout au long de la vie professionnelle.
Doté de 24 heures de formation par an, ce CPF était assorti d'une menace de sanction à l'encontre des employeurs : ceux-ci s'engageaient à former chaque salarié d'une façon conséquente sur un laps de temps de six années (2014-2020 pour la première édition), faute de quoi ils devraient leur verser 100 heures de CPF et la somme de 3 000 € pour leur permettre de se former seuls (les abondements correctifs CPF).
En septembre 2018, la loi réformant la formation a reformulé cette obligation de « gestion des parcours professionnels » sur six ans, en la clarifiant et en la simplifiant.
L'employeur (de plus de 50 salariés) doit toujours organiser trois entretiens professionnels bisannuels (distincts des entretiens d'évaluation) et il doit avoir formé chacun de ses salariés (durant une centaine d'heures, soit la durée du CPF abondé dans la loi de 2014).
D'où vient ce chiffre de 100 heures de formation sur un parcours professionnel de six années ?
En 2014, le calcul des pouvoirs publics a été simple : depuis les années 2000, les salariés du secteur privé partent en formation 17 heures par an en moyenne (d'où l'invention du DIF de 20 heures, une petite hausse de 15 % de la durée moyenne de formation). Il s'agit donc désormais de former chaque travailleur au moins 17 heures par an sur le temps de travail (y compris et surtout les salariés peu ou non qualifiés).
Si l'employeur n'y parvient pas au bout de six années, il doit fournir les moyens (3 000 €) de se former une centaine d'heures (via ce CPF qui ne dépend plus de l'employeur) à chacun d'eux.
Formez vos salariés 100 heures sur votre plan ou versez-leur (sur leur CPF) les moyens de se former 100 heures par eux-mêmes.
Si ces 100 heures de formation semblent encore être un horizon inatteignable dans beaucoup d'entreprises, c'est pourtant bien peu (17 heures par an) face aux immenses défis qui attendent les travailleurs et les employeurs dans l'économie de la connaissance : reconversions et réorganisations massives, dématérialisation du travail et des procédés, robotisation, désintermédiation, globalisation, transformation énergétique etc.
Le rôle du nouveau CSE dans le contrôle de l'obligation de gestion des parcours professionnels
Le comité social et économique (que toutes les entreprises de plus de 11 salariés doivent avoir mis en place depuis le 1er janvier 2020) a évidemment la capacité de vérifier (avec l'employeur) que les conditions de bonne gestion des parcours professionnels de chaque collaborateur ont été remplies.
- Il sera informé de l'option* choisie par l'employeur pour la bonne gestion des parcours de formation :
* soit le 6 mars 2020 pour les trois conditions de formation inscrites dans la loi du 5 mars 2014 ;
* soit le 31 décembre 2020 pour les deux conditions de formation inscrites dans la loi du 5 septembre 2018. - Il vérifiera que chaque collaborateur a bien bénéficié de ses trois entretiens professionnels (obligatoires dès le premier salarié dans les entreprises) et des entretiens de retour de congés longs (maladie, parental, maternité...).
- Il contrôlera que l'employeur a effectivement formé et développé les compétences de chaque salarié (y compris les saisonniers ou les CDD qui ne doivent pas être victimes de discrimination).
- Il vérifiera que l'éventuel abondement correctif de 3 000 € a été effectivement versé sur le compte CPF de chaque collaborateur (qui doit aussi en être informé individuellement) avant le 31 décembre 2020.
Dans le monde du travail, c'est désormais bien la qualité du travail, des parcours et des formations qui prévaudront et seront garants de la pérennité de l'activité. À ce titre, les représentants du personnel ont un rôle éminent à jouer.