Deux prix, deux contributions aux débats actuels sur une ESS transformatrice
La remise des Prix 2022 du livre sur l’économie sociale et solidaire devrait, plus que jamais, retenir l'attention avec deux ouvrages qui apportent une contribution d'importance aux débats du moment. La manifestation organisée par le Toit citoyen, qu’anime Patrick Gobert, a couronné deux ouvrages de la très bonne collection de Camille Dorival, « Mondes en transitions » aux éditions des Petits Matins, que j’ai fréquemment évoquée.
Ce sont deux ouvrages écrits à quatre mains:
- le premier dans la catégorie « Experts » : « Un notre monde est possible » de Sébastien Chaillou et Stéphane Pfeiffer,
- le second dans la catégorie « Témoins » : « Être radical » par Bastien et Hugues Sibille.
L’ESS est une économie de sociétés de personnes, certaines anonymes, certaines plus singulières voire marquantes et c’est le cas de nos auteurs. Sébastien Chaillou et Stéphane Pfeiffer ont été tous deux dirigeants de l’UNEF. Comme tels, ils ont été amené à participer, avec Anne Cécile Dockès, elle aussi militante syndicale, à la création de la SCIC Solidarité étudiante et c’est à partir de cette expérience et du parcours qu’ils ont ensuite entamé qu’ils ont bâti leur ouvrage. Sébastien est devenu directeur de la CRESS Ile-de-France et Stéphane 2ème adjoint du maire de Bordeaux en charge de l’ESS. Ils sont légitimes à interroger le capitalisme financier et à s’interroger sur les « mutations » que les libéraux entendent lui faire prendre. Pour eux, il s’agit dès lors d’engager des changements, notamment du travail pour ce « notre monde » auxquels ils aspirent en pensant qu’une alternative est possible et que celle-ci passe par l’engagement citoyen et par une nouvelle approche des communs. Dans leur conclusion, ils affirment que les solutions ne sont pas dans un ailleurs éthéré mais qu’il faut aussi « (re)prendre le pouvoir » à travers des engagements politiques renouvelées.
Hugues et Bastien Sibille sont père et fils. C’est à un « dialogue entre deux générations pour transformer l’économie » qu’ils nous invitent. Hugues, militant de la deuxième gauche, co-fondateur du Centre des Jeunes Dirigeants de l’Economie Sociale, fut aussi délégué interministériel à innovation et à l’économie sociale avant d’exercer des responsabilités au Crédit coopératif et de cofonder le LaboESS. Tout un parcours en ESS. Son fils s’est très vite lancé dans l’aventure des logiciels libres et des moyens de mettre le numérique au service de l’émancipation. Dans la confrontation de leurs engagements et des réflexions auxquelles ils conduisent ils ont tiré cet ouvrage utile. Sans doute la référence à la « radicalité », dans le contexte actuel est-elle une prise de risque mais elle témoigne de la générosité des convictions de tous deux.
Ainsi le jury fut-il avisé à primer ces deux nouvelles contributions au sein d’une collection déjà riche en la matière.