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01 / 06 / 2020 | 118 vues
Jean Louis Cabrespines / Membre
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Beaucoup de productions pendant le confinement sur une économie autre : pour quel projet collectif ?

« Je voudrais pas crever », c’est vraiment la réflexion que m’inspirent les jours confinés, ceux que nous n’avons pas souhaités et avons vécus avec plus ou moins de bonheur.

 

Pour moi, pas de problème : dans ma maison de Bourgogne, j’ai savouré le temps familial, les échanges fréquents avec des amis (par téléphone), des travaux sans cesse (plus que d’habitude ?) par visioconférence ; j’ai vu les villes désertes, les masques qui manquent, les mensonges grossiers face à l’impéritie de ceux qui nous gouvernent et qui ont probablement été dépassés par la situation, les nombreux (trop sans doute) spécialistes en tout et en n’importe quoi, les artistes qui tentent de nous divertir tout en devant nous dire ce qu’ils pensent de la situation (sans être des spécialistes), les statistiques qui maintiennent l’angoisse et développent les incompréhensions etc. Les oiseaux dans les arbres, les chats dolents qui viennent dans nos pattes pour des caresses et le soleil qui n’a pas cessé de briller durant ces 55 jours.

 

Et des lectures, des lectures, tant et tant car, il faut le dire, tous ceux qui savent écrire s’en sont donné à cœur joie, comme s’il y avait urgence à montrer que l’on existe, qu’on peut influencer l’avenir, comme s’il y avait nécessité à laisser une trace de son passage « covidien ».

 

C’est un peu comme ce que pourrait dire Jacques Seguela : « qui n’a pas écrit son texte dans les 50 jours du covid n’a pas réussi sa vie ».

 

Comme Boris Vian, je me suis dit que « je voulais pas crever » car il y a « tant de trucs encore - Qui dorment dans les crânes - Des géniaux ingénieurs - Des jardiniers joviaux - Des soucieux socialistes - Des urbains urbanistes - Et des pensifs penseurs ».

 

Alors, j’ai regardé, j’ai lu, j’ai tenté de comprendre à la fois ce qu’ils ont écrit et ce qu’ils veulent pour notre avenir et là, juste dans le petit domaine dans lequel j’ai quelques compétences et encore une présence continue pour défendre des idées et des conceptions d’une économie autre (l’ESS), j’ai trouvé de quoi me noyer dans les concepts, affirmations et propositions de ceux qui savent et qui pensent.

 

J’ai parfois retrouvé de vieilles idées recyclées qui n’avaient pas pu émerger dans le monde d’avant et qui ressortent pour le monde d’après mais j’y ai aussi découvert de nouvelles manières de concevoir le vivre ensemble, le respect des autres et de soi-même, la préservation de notre planète dont nous ne sommes qu’une composante, la réaffirmation de la pertinence de l’ESS et la recherche d’un ailleurs plus ouvert et plus respectueux.

 

Pour vous en donner un aperçu, voici une liste (loin d’être exhaustive) de quelques tribunes, appels, pétitions et mobilisations pouvant éclairer sur ce que certains « pensifs penseurs » pensent (classés par ordre alphabétique de premier mot) :

 

  • 55 organisations : « Le pacte du pouvoir de vivre » (site pactedupouvoirdevivre.fr),
  • Alain Supiot : « Seul le choc avec le réel peut réveiller d’un sommeil dogmatique » (Alternatives Économiques),
  • Alternatiba : « Et si Alternatiba et 60 intellectuel.les et artistes dessinent le monde d’après » (site Alternatiba),
  • Christian Sautter : « Le pari de la coopération vivante » (Le Labo de l’ESS),
  • Claude Alphandery : « Pour résister à la pandémie comme au temps du maquis » (Le Nouvel Obs),
  • Dominique Hays et Christian du Tertre (réseau Cocagne) : « Alimentation et démocratie : rejoignons-nous maintenant, pour après » (La Tribune),
  • Fondation Good Planet : « Le monde d’après sera solidaire ou ne sera pas » (site Good Planet),
  • Hugues Sibille : « Vivre et résister » (Le Labo de l’ESS),
  • Institut Rousseau : « Vers un nouvel ordre écologique international » (site Institut Rousseau),
  • Jérôme Saddier : « Pour que les jours d’après soient des jours heureux » (site ESS France),
  • Nicolas Hulot : « Le temps est venu » (100 principes pour un nouveau monde dans le Monde.fr),
  • Patrick Weil: « La planification doit devenir non le cadre de toute l’action économique mais une coopération dans des secteurs clefs » (Le Monde),
  • Pierre Dardot et Christian Laval : « L’urgence démocratique » (Médiapart),
  • Stéphane Veyer : « Coopérer, une idée qui fait son chemin » (tribune à l'initiative des coopératives de Bigre (SMart, Coopaname, Manufacture coopérative, Oxalis/-Oxamyne) et de la Confédération générale des SCOP),
  • Sylvain Reymond : « L’économie sociale et solidaire s’impose comme la locomotive de l’économie de demain » (Usbek & Rica),
  • Thierry Jeantet : « Le triangle des possibles » (Alternatives Économiques),
  • Timothée Duverger : « Le revenu universel » (reprise dans plusieurs tweets).
     

Je vous accorde que la liste est longue mais elle est très incomplète. Que ceux que j’ai oubliés m’excusent ; ils pourront compléter. Il faudrait ajouter à cela tous les appels qui touchent spécifiquement au clivage qui s’est creusé entre les riches et les pauvres durant cette période.
 

On a beaucoup parlé de sanitaire pendant cette crise mais bien peu de social et d’humanitaire (Cynthia Fleury a écrit « Le soin est un humanisme », texte qui doit nous faire réfléchir et nous éclairer), rarement des gens qui se retrouvent avec peu de ressources, avec une distanciation des liens sociaux ou dans une détresse affective autant que pécuniaire. C’est pourquoi des organisations comme La Croix Rouge Française, le collectif Alerte, le Collectif des Associations Citoyennes, l’UNIOPSS, Caritas etc. ont alerté sur ces situations. Le monde de demain demandera indéniablement que nos actions pour les plus en difficulté changent.


Au bout du compte, tant d’écrits sont-ils productifs ? Oui, ils pourraient l’être si chacun ne voulait pas rester dans son pré carré et si chacun mettait son ego et sa soif de reconnaissance dans sa poche pour agir ensemble. L’ESS a partiellement perdu ce qui devrait constituer son socle : un projet collectif.
 

Le seul qui pourrait permettre de retrouver le sens d’un projet économique partagé (et son texte est un appel à ce regroupement pour agir) est le président d’ESS France. Il peut être fédérateur et permettre à tous de trouver un chemin commun pour aller de l’avant et faire du « monde d’après » un monde dans lequel les valeurs de l’ESS pourront s’exprimer et proposer un changement de paradigme économique, social et écologique.

Alors, chiche ?

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