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Les petites entreprises face aux RPS : quelles spécificités, quelles actions, quel droit ?
Issu d'un projet de recherche financé par la région Aquitaine, un colloque est organisé sur « les petites entreprises face aux risques psychosociaux. Quelles spécificités, quelles actions, quel droit ? ». L'objectif de ces journées organisée au pôle juridique et judiciaire de l'Université de Bordeaux du 6 au 8 décembre 2017 est de mettre en relation acteurs et chercheurs et de profiter des perspectives des uns et des autres.
Le premier jour sera plutôt centré sur les spécificités des risques psychosociaux dans les petites entreprises, le deuxième jour sera plutôt orienté vers les actions et la matinée du troisième jour sera consacrée à deux tables-rondes dédiées aux acteurs institutionnels et aux partenaires sociaux. Nous aurons la chance d'entendre nos collègues québecois Jean-Pierre Brun, Caroline Biron, Mouna Knani et Pierre-Sébastien Fournier, de la chaire de gestion en santé-sécurité au travail à l'Université Laval. Nous aurons aussi le plaisir d'accueillir Nicole Rascle, pychologue de la santé de l'Université de Bordeaux, Deede Sall, sociologue de l'Université Paris I-Panthéon Sorbonne, Sandrine Caroly , ergonome de l'Université de Grenoble, Manal Azzi du Bureau international du travail, Marc Malenfer et Valérie Langevin de l'INRS, Boris Vieillard de la Direction générale du travail. Laurence Gatti, universitaire juriste de l'Université de Poitiers, viendra clore ces trois jours de travail par un exercice de synthèse et de réflexion.
Les tables-rondes des 6 et 7 décembre après-midi porteront respectivement sur la « santé mentale dans les petites unités productives » et sur « les relations collectives dans les petites entreprises ». Elles seront menées par Sylvie Célérier et Véronique Louazel, sociologues à l'Université Lille I, par Frédéric Rey, sociologue au CNAM, et Gaëtan Grafteaux, juriste à l'Université de Bordeaux.
Les petites entreprises sont les moins étudiées en matière de risques psychosociaux (RPS).
Une majorité de salariés travaille au sein d’une petite structure. Paradoxalement, ces petits établissements sont les moins étudiés en matière de risques psychosociaux. Le projet PERPS financé par la région Aquitaine est l'occasion de pallier cet état de fait et d'engager une recherche mêlant plussieurs discplines sur la question des « RPS dans les petites entreprises ».
L’introduction de la notion de « santé mentale » aux côtés de la « santé physique » dans le Code du travail par la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale a expressément mis l’accent sur une approche globale de la protection de la santé au travail. Les obligations auxquelles les employeurs sont soumis en matière de prévention des risques et leur responsabilité dans ce domaine ont ainsi été précisées par le législateur mais aussi (et surtout) par un important travail d’interprétation des textes par les juges. Depuis 2002, l’employeur est soumis à une obligation légale et générale de prévention des risques d’atteintes à la « santé physique et mentale » et à une obligation de sécurité très stricte.
Cette évolution du droit de la santé-sécurité au travail s’est réalisée sans distinction d’effectif dans l’entreprise. Comme les grandes organisations, les PME et TPE sont dès lors tenues de mettre en œuvre des moyens de prévention adéquats et de répondre à des risques professionnels encourus collectivement et concomitants à un contexte de tensions sociales, de crise économique et de l’emploi.
Malgré le plan d’urgence de prévention du stress au travail du 9 octobre 2009, qui soulignait le problème de la confrontation des petites entreprises aux contraintes juridiques en santé-sécurité au travail, les études dans ce domaine ne sont pas encore nombreuses. L’essentiel des données disponibles provient de témoignages d’acteurs de la prévention (notamment de médecins et d'inspecteurs du travail et de représentants de petites entreprises) et porte sur des situations particulières. Il ressort de leur expérience une interrogation sur le caractère approprié des règles actuelles et le constat que les chefs d’entreprises se trouvent institutionnellement et/ou culturellement privés de moyens extérieurs pouvant les aider à agir sur ces situations. Les RPS dans les petites entreprises reste aussi l'une des priorités du troisième plan de santé au travail.
L'avis du conseil économique, social et environnemental du 14 mai 2013 relatif aux RPS au travail préconise d’ailleurs qu’« une attention particulière doit être portée aux PME/TPE afin de les accompagner dans la démarche d’évaluation et de prévention des risques psychosociaux ». PME et TPE connaissent des spécificités en termes d’organisations du travail, de rapport à la hiérarchie, de proximité interindividuelles et de fonctionnement que ne connaissent pas les grandes entreprises. La faible taille de l’entreprise rend ainsi spécifiques les modes de management liés à une culture familiale, à une exposition particulièrement sensible aux variations du marché.
Les entreprises de moins de 50 salariés échappent pour l’essentiel au droit de la santé-sécurité au travail. Or, compte tenu de la législation actuelle, les entreprises comptant moins de 50 salariés échappent pour l’essentiel au droit de la santé-sécurité au travail. Elles ne bénéficient pas du droit relatif au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et les plus petites d’entre elles ne connaissent pas forcément le règlement intérieur et la représentation du personnel.
Pourtant, l’amélioration des conditions de travail et le droit de la prévention des risques professionnels concernent toutes les entreprises et constituent un enjeu important tant en termes de politique de l’emploi (attractivité), de justice sociale que de santé publique. Dans ce contexte, il apparassait essentiel de mener une étude approfondie afin de proposer une réponse juridiquement adaptée aux risques RPS dans les petites entreprises en fonction des données recueillies au sein du projet PERPS.