Organisations
Conseil européen : la grande transformation de l'entreprise
Alors que le Conseil européen vient d’affirmer l’impérieuse nécessité de retrouver un rythme de croissance minimum pour sortir de la crise et éponger les dettes souveraines, une question demeure : sur quel socle fonder ce retour à la croissance ?
En effet, les 120 milliards d’euros que les dirigeants européens viennent de mettre sur la table ne sont en fait que des budgets potentiels pour financer des projets industriels et commerciaux dont beaucoup restent encore à définir et à mettre en œuvre.
La mise en place d’un nouveau modèle de croissance que les responsables politiques appellent tous de leurs vœux ne résultera pas simplement d’une réorientation de la dépense publique européenne, nécessaire mais insuffisante. Pour cela, il est indispensable de créer des biens et des services utiles aux sociétés européennes et de vendre des produits compétitifs sur le marché mondial, tout en préservant les ressources naturelles, en respectant l’environnement et en se fondant sur la principale richesse dont dispose l’Union européenne, le développement des hommes et femmes qui y travaillent et y habitent.
- Dans cette perspective, le système productif constitue le socle essentiel de ce régime de croissance et la grande transformation que connaît l’entreprise depuis plusieurs décennies représente une opportunité fondamentale, pour peu que l’on sache dessiner pour elle un projet politique à même de relever les défis économiques, sociaux et environnementaux de la société du XXIème siècle.
Telle est la perspective que je propose avec deux autres auteurs dans un livre, La grande transformation de l’entreprise, publié en avril dernier aux éditions de l’Atelier (avec une préface de François Hollande).
Il est possible d’articuler l’entreprise d’aujourd’hui avec la société de demain, pour ré-enchanter le travail et pour qu’elle reste l’indispensable lieu de création de richesse et le moteur de l’innovation sociale et technologique qui fondent le progrès humain de toute société.
À condition toutefois que l’entreprise arrête de se cantonner à n’être qu’un centre de profit : elle doit désormais assumer ses responsabilités sociales, territoriales et environnementales.
En analysant l’évolution du rôle de l’entreprise au sein des différentes formes de capitalismes qui se sont succédé au cours du XXème siècle, en examinant comment la diffusion progressive du modèle anglo-saxon, centré sur l’intérêt financier à court terme de l’actionnaire, a malmené le sens du travail, limité l’innovation et accentué les inégalités de revenus et de statuts, nous soulignons combien les formes les plus courantes d’entreprise ne sont pas capables de relever les défis posés par un modèle de croissance compétitif et durable.
- Loin de se réduire à ce constat, nous mettons en avant les modèles nationaux et les formes d’entreprise qui créent des dynamiques positives permettant de suggérer et d’envisager de quoi le progrès social sera fait demain.
Nous proposons neuf transformations à opérer pour que l’entreprise au XXIème siècle soit une entité qui ait du sens pour ses salariés, ses partenaires et pour le territoire où elle est implantée. Ainsi, nous montrons que la responsabilité sociale de l’entreprise et les intérêts de ses différentes parties prenantes sont mieux prise en compte dans le cadre d’une gouvernance partenariale, fondée sur le modèle dual (conseil de surveillance et directoire).
Nous appelons à développer des politiques de développement humain plus affirmées : bien-être au travail, montée en compétences et évolution professionnelle, participation des salariés aux changements du travail, diversité et égalité professionnelle… Nous soulignons l’urgence à bâtir de nouveaux rapports plus coopératifs entre donneurs d’ordre et sous-traitants, à renouveler le contenu et les formes des relations sociales et professionnelles, à transformer les pratiques des acteurs sociaux et les modes de management.
Faire ce pari pour la France et pour l’Europe, c’est sortir l’économie de la dictature du court terme et du carcan de la financiarisation pour combiner, dans la durée, la recherche de la compétitivité, le souci écologique et le bien-être social.
Deux occasions de débat avant l’été :
Jeudi 5 juillet, à 19h00, débat avec Jean Kaspar, à la librairie Le Divan, au 203, rue de la Convention Paris XVème - M° Convention.
Mardi 10 juillet, à 18h00, à l’invitation de l’association Europe & Entreprises, à la Maison de l’Europe, 35-37, rue des Francs Bourgeois Paris IVème - M° Saint Paul.