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30 / 09 / 2010 | 24 vues
Pierre Meriaux / Membre
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Alerte rouge sur la médecine du travail !

Par un artifice, un « cavalier législatif » dans le projet de loi sur les retraites, le gouvernement introduit une réforme de la médecine du travail (amendement 730).

La médecine du travail a effectivement besoin d’une réforme au regard de son bilan mitigé :

  • suivi déficient des travailleurs temporaires et précaires,
  • exclusion de nombreuses catégories de salariés,
  • polarisation sur les visites d’aptitudes plus que sur les conditions de travail,
  • faillite de l’amiante,
  • indépendance par rapport aux employeurs-payeurs difficile à faire vivre,
  • perte de son attractivité pour les étudiants alors que plus de la moitié des médecins à plus de 55 ans…

Oui à une réforme, mais pas celle-ci

Le gouvernement a systématiquement repris les propositions du Medef que ce dernier n’avait pas réussi à obtenir dans les négociations engagées avec les organisations syndicales sur les missions et l’organisation des services de santé, sur le rôle des directeurs de service, sur la conception de la pluridisciplinarité…

Le projet renforce la pluridisciplinarité via le recours aux intervenants en prévention des risques et aux infirmières, mais demeure obstinément muet sur les garanties et les protections destinées à garantir l’indépendance de ces professionnels face aux employeurs et aux directeurs de service.

L’axe de la médecine du travail, c’était le médecin chargé de prévenir les atteintes à la santé du fait du travail, bénéficiant d’une indépendance technique et d’une protection contre le licenciement, le service de santé complétant les compétences et ayant une fonction d’organisation logistique.

  • Désormais, c’est le service qui a une simple mission de promouvoir la santé, dans le cadre d’un projet de service interne dont le médecin n’est qu’un des intervenants. Ce projet de service est soumis au conseil d’administration présidé par un représentant employeur ayant voix prépondérante !

De la médecine du travail à la médecine d’entreprise !

Pire, le projet définit le rôle des directeurs de service tel que le demandait le syndicat patronal revendiquant une autorité hiérarchique et fonctionnelle : « organise(r) sous l’autorité du président, les actions définies par le conseil d’administration. Le directeur est garant de l’indépendance du médecin du travail ».

  • Beau tour de passe-passe : le directeur, choisi par l'employeur-président du CA et non doté de protection contre le licenciement, est chargé de garantir l'indépendance du médecin du travail !

Or, l’indépendance est une condition indispensable pour rétablir la confiance des salariés dans la médecine du travail.

  • Le gouvernement crée une sorte de « bouclier managérial » via cette contre-réforme de la médecine du travail, alors que les jurisprudences commencent à cibler nettement la responsabilité des employeurs, des managers dans l'émergence de la « souffrance au travail ».

Nous partageons donc l’avis de l’Andeva et de la Fnath qui ont estimé qu’il s’agissait de « confier les clefs du poulailler au renard ».

Nous invitons les confédérations syndicales de salariés à réagir fortement, à refuser cette réforme et sommes prêts à participer à toute initiative unitaire de défense de la médecine du travail.

En tant que syndicat d'agents du Ministère du Travail, de professionnels de la prévention et de la répression des atteintes aux droits des salariés que le Code du Travail est censé protéger, nous lançons une alerte forte aux parlementaires : si vous validez cette réforme de la médecine du travail, vous vous rendrez complices d'une dégradation considérable de la santé au travail dans ce pays dans les années à venir, en supprimant de facto l'un des outils permettant aux salariés de faire reconnaître leurs conditions de travail réelles.

Pas plus que la Camorra ne peut organiser la lutte anti-drogue ou les syndicats de buralistes la lutte anti-tabac, on ne peut abandonner la médecine du travail au patronat !

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