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10 / 07 / 2009 | 11 vues
Eric Chauvel / Membre
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Inscrit(e) le 08 / 07 / 2009

Air France : le "collège PNC" est bien la base d’un problème électoraliste

L’UNAC, l’UNSA et la CFTC ont pris la décision de suspendre le préavis de grève pour cet été. Lors de la dernière réunion au ministère des transports , nous avions obtenu des garanties de la part du Gouvernement sur le fait qu’il rédigerait et soutiendrait un amendement visant à maintenir un collège PN (Personnel Navigant) Air France, subdivisé en deux collèges distincts, un PNT (Personnel Navigant Technique) et un PNC (Personnel Navigant Commercial).

Cet amendement a bel et bien été déposé et soutenu par la commission des affaires économiques. Dès lors, nous avons tenu notre engagement et levé le préavis.

Le dossier n’est cependant pas clos et nous n’excluons pas de déposer un nouveau préavis si l’Assemblée refuse les propositions de modifications.

Dans ce débat, communément appelé «collège PNC», tous les syndicats n’ont légitimement pas la même approche.


Certains considèrent que les PNC ne doivent pas échapper aux règles communes de représentativité, telles que déclinées dans la loi du 20 août 2008. Rien d’étonnant puisque ces organisations sont à l’initiative de cette loi. Pas besoin de trouver des arguties pour justifier de cette position, quand elle est assumée et défendue sur le plan national par ces confédérations. D’ailleurs, ils n’en font aucun mystère. L’objectif est de re-dynamiser le paysage syndical, autrement dit dégager les petits syndicats, au nom de la démocratie.

D’un point de vue macro, cette vision peut être comprise. Faire le constat que trop de syndicats tuent le syndicalisme est une réalité.

Estimer que le syndicalisme de niches est une aberration d’iniquité est audible. En effet pourquoi faudrait-il réserver des passe droits, à certaines corporations minoritaires dans des entreprises ou dans des branches professionnelles ? Le but d’un syndicat n’est-il pas de trouver des équilibres entre les populations qu’il représente ?

Cependant, d’un point de vue micro, la réalité peut être tout autre et notamment dans de grandes entreprises comme Air France.

Et personne ne s’y trompe. Les premiers étant les syndicats qui s’opposent au maintien d’un collège catégoriel PNC. Ceux-la mêmes qui considèrent que c’est un problème électoraliste. Le problème n’est pas tant que nos accords soient négociés par des collègues du sol, ils ne sont pas moins bons syndicalistes que les PNC. Mais c’est que par des manoeuvres (pour le coup, bassement électoralistes) on ne laisse pas la possibilité à des PNC d’être représentatifs de leur corporation, donc d’avoir l’opportunité de défendre leurs intérêts, parfois contradictoires avec d’autres corporations de l’entreprise.

  • Cette démonstration vaut à l’inverse, dans des Compagnies où les PNC sont ultra-majoritaires : Aigle Azur ou Air Méditerranée...

Petit scénario électoraliste

Imaginons le scénario suivant : un grand syndicat confédéré, le premier dans l’entreprise, bien que sa section PNC ne représente que 6% de l’établissement CE.OA. Du point de vue sa survie syndicale chez le PNC, deux solutions s’offrent à lui.

Première solution, peser de tout son poids pour qu’il n’y ait plus de négociations d’établissements mais des négociations au niveau de l’entreprise. Fort des 30% qu’il représente, au niveau de l’entreprise, en additionnant ses voix des huit CE, il peut alors négocier et signer des accords majoritaires pour le PNC, sans même avoir de délégués syndicaux PNC. Le pied quoi...

Deuxième solution, élargir le CE.OA à d’autres services de l’entreprise et ainsi submerger numériquement la population PNC. Là encore c’est comme gagner à la loterie, au tirage, (aucune difficulté pour totaliser les 10% nécessaires pour être représentatifs dans l’établissement), au grattage (récupérer le bureau du CE.OA, renoncer à l’inversion des flux et alimenter les caisses percées du CCE).

La conclusion que l’on peut en tirer en toute objectivité, c’est que le collège PNC est bien la base d’un problème électoraliste. Mais sans doute moins pour les organisations qui réclament le collège que pour celles qui s’opposent à son maintien.

Un collège PNC à Air France garantit aux sections syndicales PNC de pouvoir jouer le jeu de la démocratie. Il garantit également de pouvoir mesurer dans une catégorie professionnelle, le poids des signatures, y compris si cette catégorie est dispersée dans plusieurs établissements. Par exemple pour apprécier la validité d’un même accord qui couvrirait le PNC parisien et le PNC antillais.

Si lors des prochaines élections, le PNC décide de se faire représenter par des sections qui ont une vision plus interprofessionnelle du syndicalisme, ça sera son choix et personne ne pourra remettre en cause sa légitimité. Au moins les choses seront claires, les voix décomptées qui en décideront seront exclusivement PNC.

L'opportunité d'un conflit

Il y a rarement un moment opportun pour lancer un conflit, ce n’est jamais le moment. Les discours et les arguments ne changent guère, situation économique de l’entreprise, crise du transport aérien, responsabilité face à la clientèle, départ en vacances... Bref les seules grèves  qui seraient tolérées par les directions sont celles qui n’auraient aucune incidence. La nuit par exemple quand les pistes sont fermées ou à la Japonaise, en arborant un brassard «pas content» (et encore un tout petit brassard).

Mais la responsabilité d’un conflit n’est pas univoque, elle est partagée entre les organisations qui appellent à la grève et les patrons.

Ne perdons pas de vue qu’il a fallu cette menace, pour commencer à obtenir le début d’un soutien de la part des patrons pour qu’un collège PNC soit maintenu, une revendication qui ne coûte rien en terme économique, (si ça n’est de froisser trois grandes organisations syndicales dont le Medef).

N’oublions pas non plus, que de façon concomitante, la direction avait, elle aussi, des revendications et pas des moindres : instaurer une limitation du droit de grève pour le PN (en définissant sa mission) et restreindre le champ d’investigation des CHSCT PN, malgré la tragédie de l’AF 447. Ces dossiers ont été rejetés par le gouvernement, du moins pour l’instant.

Que les organisations qui considèrent qu’il ne faut pas maintenir un collège PNC à Air France l’assument.

Il n’y a rien de choquant à avoir des avis différents. Inutile de se retrancher derrière des faux-semblants (c’est pas le moment c’est la crise, y a pas de risque, mais les pilotes c’est autre chose), des arguments qui sont d’habitude ceux des patrons.
Nous nous en remettons au libre arbitre des salariés.

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