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08 / 07 / 2009 | 52 vues
Franck Mikula / Membre
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Air France : collège électoral spécial pour le personnel navigant commercial

Des discussions se sont tenues ces dernières semaines entre un certain nombre de syndicats de navigants et les représentants des ministères (transports/travail) au sujet d’un projet de loi qui, après être passé au Sénat le 9 mars dernier, doit être voté fin juillet (ou septembre) par l’Assemblée Nationale.

Ce projet devait initialement :

  • supprimer l’article L342-4 du code de l’aviation civile qui prévoit un collège spécial pour les navigants à Air France,
  • restreindre le droit de grève des navigants,
  • restreindre le champ d’action des CHSCT-PN.

La CFTC, le SNPNC-FO, l’UNAC, l’UNSA sont intervenus tout d’abord auprès des Sénateurs au début de l’année, avec le succès que l’on connaît puisque le projet de loi a été adopté par le Sénat sans prendre en compte nos propositions d’amendements (ni celles des syndicats de pilotes, d’ailleurs). Nos interventions ont ensuite continué auprès des Députés et du Gouvernement pour :

  • conserver un collège spécial à AF et le diviser en deux sous-collèges (pour donner satisfaction aux PNT et aux PNC),
  • étendre ces collèges aux autres compagnies qu’AF, 
  • supprimer les restrictions du droit de grève des navigants et du champ d’action du CHSCT-PN.


Ces quatre syndicats ont déposé un préavis de grève nationale auprès du Secrétaire d’État chargé des Transports afin de faire aboutir ces revendications.

Nouvel amendement

Le 22 juin, après arbitrage du Premier Ministre et des conseillers de la Présidence de la République, le Gouvernement a donné son feu vert à une nouvelle proposition :

  • maintenir le collège spécial à AF, créer un collège PNT dans toutes les compagnies (le collège PN d’AF ne contient donc plus que les PNC),
  • retirer les modifications prévues concernant le CHSCT-PN, 
  • continuer de permettre aux navigants de se déclarer grévistes lors d’un passage à la base d’affectation.

La Commission chargée des affaires économiques de l’Assemblée a voté en faveur de ces modifications dès le lendemain.

C’est donc un demi-succès pour les syndicats qui avaient appelé à un conflit national. En effet, nous n’avons pas réussi à rendre obligatoire un collège PNC dans toutes les compagnies. Néanmoins, ayant plus à perdre qu’à gagner dans une poursuite du conflit, la CFTC, l’UNAC et l’UNSA ont décidé de suspendre leur mouvement jusqu’au vote final en réunion plénière de l’Assemblée (probablement fin juillet).

Pourquoi faire tout cela ?

La raison majeure de notre action, c’est de pouvoir conserver la possibilité, comme aujourd’hui, de négocier et de signer des accords strictement catégoriels (Accord Collectif PNC). Pour qu’un accord collectif PNC soit possible, il faut pouvoir identifier la catégorie professionnelle (collège électoral spécifique) et mesurer les 30 % des voix au CE, de cette catégorie seulement.

Jusqu’à présent, à Air France, le collège spécial était prévu par la Loi, il n’était donc pas très difficile pour les syndicats de PNC de construire un accord collectif strictement PNC (pas très difficile est un doux euphémisme, il a quand même fallu près de 50 jours de grève de l’UNAC pour que la Direction accepte enfin, en 1999, d’en négocier un avec les PNC).

À défaut de collège PNC, nous aurions dû négocier soit des accords d’établissement, soit des accords d’entreprise. Le risque n’était absolument pas de voir des  « gens du sol » négocier les accords PNC, tous les syndicats PNC sont animés par des PNC responsables, mais tout simplement de voir les calculs de majorité s’effectuer avec des voix venant d’autres catégories professionnelles. Par exemple, un syndicat ultra minoritaire chez les PNC pourrait devenir majoritaire en prenant en compte les voix des autres catégories professionnelles. Cela aurait rapidement signé la fin des accords strictement PNC.

Tous les syndicats PNC étant affiliés à une confédération, leur « représentativité », c’est-à-dire leur capacité à exister, sera mesurée dans l’établissement et non dans le seul collège PNC. Pour les pilotes, la situation est différente. Plusieurs syndicats de pilotes ne sont pas affiliés à une confédération syndicale et si le critère des 10 % des voix de l’établissement leur était appliqué pour conditionner leur existence, certains « passeraient à la trappe ». De plus, le critère des 30 % des voix permettant de valider les accords serait très difficile à atteindre même pour les plus gros syndicats de pilotes. Ils ont donc demandé et obtenu (ce n’est pas encore voté, rappelons-le) que la mesure de leur représentativité se fasse par rapport aux seules voix des pilotes.

Pourquoi ce débat polémique sur la définition des cadres ?

Tout simplement parce que pour construire le dispositif de mesure de la représentativité des pilotes le Gouvernement s’appuie sur ce qui existe déjà pour les cadres dans le Code du travail. En effet, le législateur a reconnu aux cadres la légitimité de pouvoir être représentés dans les entreprises malgré leur infériorité numérique. Ceci a abouti à la création du collège C et au bénéfice de la représentativité irréfragable de la CGC. Le Gouvernement dit donc que, comme les pilotes correspondent à la définition des cadres et qu’ils sont en infériorité numérique, on peut leur appliquer la même règle.

Les PNC n’y correspondant pas, ils ne peuvent bénéficier de la même chose. Cela ne veut pas dire que les PNC ne peuvent pas avoir un collège spécifique, cela signifie seulement qu’on ne peut pas copier le dispositif applicable aux cadres pour mesurer la représentativité des syndicats PNC dans le collège PNC (ce raisonnement pourrait être contestable pour ce qui concerne l’UNAC affilié à la CGC, mais ce n’est pas l’objet de notre propos ici).

Et les autres compagnies ?

Contrairement à ce qui existe dans le code de l’aviation civile pour Air France, la loi n’a jamais prévu que les navigants des autres compagnies bénéficient d’un collège électoral spécial. Cela ne veut pas dire qu’ils ne peuvent pas en avoir un, il faut seulement que les syndicats soient tous d’accord pour en créer un au moment des élections. C’est ainsi que, dans la plupart des compagnies on a toujours, ou presque, réussi à se mettre d’accord. Force est de reconnaître que depuis la Loi du 20 août 2008 il est devenu plus difficile d’en créer un, faute d’unanimité des syndicats (Britair, Cityjet, par exemple).

En cas de désaccord, c’est l’inspection du travail qui doit définir les collèges électoraux. Nous avons demandé au Gouvernement que des consignes soient données aux inspections du travail pour qu’en fonction de la proportion de navigants dans l’entreprise un arbitrage favorable soit rendu en faveur du collège PNC. D’autre part, nous sommes convaincus que les syndicats qui se déclareraient représentants des PNC et qui refuseraient de créer des collèges spécifiques se « tireraient une balle dans le pied ». Car, le fait d’interdire une représentation catégorielle aux PNC serait un très mauvais calcul électoral !

Nous allons continuer notre action pour que les navigants puissent négocier et signer des accords catégoriels dans toutes les entreprises.

Devant ces avancées, incomplètes mais avancées tout de même, les syndicats CFTC, UNSA et UNAC ont annoncé la levée de la grève prévue en précisant qu’ils se réservent la possibilité de déposer un nouveau préavis si les engagements n’étaient pas respectés.

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