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À l'hôpital, le changement est inscrit à l'ordre du jour mais la séance n'est pas convoquée
À la maternité de Port-Royal, une enquête administrative ne règlera pas les dysfonctionnements. C’est un drame sans retour possible pour des parents a qui l’on a volé une vie. Rien ni personne ne peut réparer cela. Malheureusement, ce drame suit d’autres drames. Nous espérons toujours qu’il ne soit pas suivi par d’autres. Mais cette espérance s’évapore chaque lendemain comme le choc des émotions médiatiques qui resurgiront lors du drame suivant.
L’administration dans son ensemble n’a pas pour habitude de chercher à comprendre les dysfonctionnements. Elle vit, depuis ses écoles, dans un régime de la responsabilité.
- Elle recherche des coupables et demeure incapable de comprendre qu’après les sanctions rassurantes se poursuivent les dysfonctionnements coupables.
C’est pourquoi il est si difficile de mettre en œuvre une politique générale de prévention des risques dans la fonction publique. Pourtant les démarches ne cessent de se développer pour leurrer la qualité. La démarche qualité, source inépuisable d’événements indésirables qui s’entassent sur des étagères poussiéreuses ou dans des barrettes mémoires vides de sens. Lorsqu’un observateur attentif, un responsable qualité, un « préventeur » ose manifester la moindre alerte, il est renvoyé à ses chères études par l’employeur. Pas de vagues, on gère [1]. Silence hôpital !
L’hôpital est riche de CHSCT depuis 1985. Mais ils sont considérés comme des ennemis alors que le bon sens voudrait qu’il soit l'allié le plus précieux de l’employeur pour lui permettre sereinement et pleinement d'assurer ses obligations en matière de sécurité et de santé des salariés qu’il emploie.
À Port-Royal comme partout, il faut observer pour comprendre, comprendre pour agir et agir pour supprimer les causes des dysfonctionnements. Or, c’est bien cette volonté d’action qui manque à l’hôpital. L’impossible action de l’employeur hospitalier qui est toujours disloqué entre les coûts et l’impossible qualité. L’hôpital doit aujourd’hui trier ses malades entre les rentables et les coûteux. On supprime des lits. On entasse les patients dans les couloirs. On concentre l’activité dans des unités de production de soins, comme à Port-Royal, dans lesquelles l’observation de la démarche de prévention disparaît dans le gigantisme.
Il en est de même en matière de prévention des risques professionnels. Les managers occupent les esprits avec les risques psychosociaux. Une expression culpabilisante qui déporte les causes sur les travailleurs eux-mêmes alors qu’il s’agit de traumatismes de l’organisation du travail (TOT).
Et maintenant, on fait quoi ?
Le changement est toujours inscrit à l’ordre du jour mais la séance n’est pas convoquée.
D’abord, il faut que le pouvoir politique affiche clairement ses choix et les assume. S’il veut supprimer des emplois dans les hôpitaux (comme promis durant la campagne) il faut assumer les conséquences : Port-Royal en fait partie, comme les maternités du Lot, comme l’ensemble des structures de soins qui sont à plus de 30 minutes des citoyens, assurés sociaux.
Certes, le risque zéro n’existe pas et les enquêtes administratives sont là pour le démontrer.
Le travail de qualité ne peut pas être une suite de manques ; manque de matériel, manque de personnel, manque de temps, manque de tout et surtout de bons sens.
Le gouvernement peut toujours réduire les moyens consacrés aux services publics. Mais ce n’est pas aux agents du secteur public de payer l’addition par des conditions de travail inacceptables, indignes, humiliantes pour tous ceux qui sont soucieux du public, du malade, de l’usager et du citoyen dans le besoin.
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